14-18Hebdo

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Deux Anglaises au chevet des Poilus – 4. Rhys, Ju, Minch (1918)

François Thibaux – 17-07-2018

Histoire de deux jeunes sœurs anglaises, Marcia et Juliet Mansel, âgées de 24 et 21 ans en 1914, qui ont, durant la Grande Guerre servi en France comme infirmières ; d’abord dans la Croix Rouge britannique puis, à partir de 1917, animées par une passion francophile rare dans leur milieu, dans les hôpitaux militaires français qu’elles jugeaient plus proches du front.

  

Traduction française de Claire Simon et François Thibaux

Les passages en français sont en italique

  

 

Au moment de la grande offensive allemande de mars 1918, qui se terminera par la contre-offensive alliée et la défaite de l’Allemagne :

  • Ju (Juliet), qui vient de fêter son vingt-cinquième anniversaire, est toujours à Zuydcoote, dans un hôpital militaire français.
  • Minch (Marcia), qui aura bientôt vingt-huit ans, est en permission en Angleterre, avec ses deux filles, mais brûle de retourner en France.
  • Leur frère Rhys est sur le front, dans les chars.

 

 

Rhys

 « Quelle guerre ! Peut-on imaginer quelque chose de pire ? Je suppose que dans les guerres futures, on considérera les combats comme de simples manœuvres et qu’on se battra à l’électricité depuis sa salle de bain… Un savant fou finira par inventer un moyen d’aplatir la terre. Ecraser tout le monde, puis retour à la case départ. »

 

 

Il avait déjà écrit, dès 1914, avant d’être blessé à la tête :

 

 

« Cette guerre n’est pas une guerre. Elle n’est qu’une conception hautement scientifique du massacre. »

 

 

Ju

« Nous avons pris l’habitude de parler comme si la guerre ne devait jamais finir. N’est-ce pas extraordinaire ? On a l’impression, à présent, que la vie ne pourra pas se poursuivre sans la guerre. »

 

 

Minch

« Quel calvaire d’être une femme dans ces circonstances ! Les hommes, bénis des dieux, ont le privilège de combattre, même s’il leur faut mourir pendant l’attaque, alors que nous ne pouvons qu’attendre, inutiles et passives. Si je devais rester en Angleterre sans jamais retourner auprès de mes blessés, je deviendrais folle. J’ignore comment nos peuples ont réussi à tenir pendant toutes ces années. Bien sûr, nous aurons des pertes affreuses, ce qui est inévitable. Mais prions Dieu pour que nous repoussions cette offensive comme les Français, à Verdun, ont contenu un ennemi supérieur en nombre. Nous devons avoir une confiance absolue en la victoire et soutenir en pensée tous ceux que nous aimons, sans cesse et jusque dans notre sommeil. »

 

 

« Ici, le paysage est enchanteur. Temps radieux, fleurs partout, oiseaux criant leur joie. Pourtant, depuis que les journaux sont arrivés, il y a quelques instants, la lumière du soleil et ce monde féerique semblent avoir disparu. On ne peut qu’être obsédé par ce qui se passe en France, insensible à tout le reste. »

 

 

Ju (goûtant toujours la poésie du monde)

« Tu sais que nous avons en face de l’hôpital une plage immense qui file à perte de vue. Devant nos yeux fascinés, des escadrons de cavalerie ne cessent de la parcourir, de la descendre et de la remonter, de se croiser et de se re-croiser dans la lumière du soir. En même temps, une ridicule petite carriole passe devant nous, tirée par deux gros bergers belges et conduite par un soldat français. Elle glisse sur le sable avec une telle souplesse et une telle douceur que nous entendons à peine le chuintement de ses roues sur le sable. Jamais je n’ai vu un spectacle aussi joli et aussi revigorant. »

 

 

L'histoire de Marcia et Juliet a fait l’objet, en 2015, d’un documentaire sur France 24, réalisé par Marie Valla.

http://webdoc.france24.com/grande-guerre-infirmieres-anglaises-poilus-france/

https://www.infirmiers.com/profession-infirmiere/presentation/femmes-en-guerre-deux-anglaises-chevet-poilus.html

Prochain article : 5. Lettres choisies (1915-1916)



17/08/2018
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