14-18Hebdo

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Carnets de guerre (Anna Vautrin) – N° 10 - 14 au 20 déc. 1914

 

Anna Vautrin, 48 ans en 1914, née Perrin, a épousé Alexis Vautrin professeur à la Faculté de médecine de Nancy. Anna est la plus jeune des enfants de Constant et Marie-Virginie Perrin. Elle a un frère Paul et quatre sœurs : Clémentine Cuny, Mathilde Perrin de Thiéfosse, Caroline Garnier et Célina Boucher. Alexis et Anna Vautrin ont quatre filles : Suzanne épouse de Paul Boucher, Madeleine épouse d’Edouard Michaut, Marguerite et Yvonne. Ils habitent à Nancy, cours Léopold, et ont une maison au bord du lac de Gérardmer, « les Roseaux ».

Document transmis par Renaud Seynave, son arrière-petit-fils  10/12/2014

 

1910 Vautrin Alexis et Anna Coll Michel Segond.jpgAlexis et Anna Vautrin en 1910

 

Lundi 14 décembre 1914

Edouard écrit du Nord : « On ne sait toujours rien de ce que nous allons faire. On enlève des troupes d’ici, on en remet d’autres ; pour l’artillerie, c’est la même chose. Des va-et-vient continuels mais on ne parle pas du départ du 20ème Corps avant son remplacement par des Anglais ».

Ce matin à 5h, nous avons eu un petit réveil en fanfare de coups de canon pas ordinaires. C’était une attaque montée par nous. C’était assez joli surtout avec les fusées éclairantes qui rappelaient un feu d’artifice.

Mardi 15 décembre 1914

Rien de nouveau.

Mercredi 16 décembre 1914

Edouard écrit du Nord : « La chose la plus étonnante ici, c’est de voir toutes les fermes habitées : les habitants ont l’air très tranquilles et travaillent dans leurs champs au milieu des éclatements d’obus de tous calibres, levant le nez simplement pour voir où ils éclatent. Ils sont d’un calme extraordinaire. Hier, il est tombé sur la batterie un gros obus qui est entré dans le sol, en est ressorti un peu plus loin et après être remonté en l’air est retombé sans éclater. Il a 90cm de longueur et 21cm de diamètre. La batterie en a reçu une trentaine de ce genre sans aucun mal pour elle ; 5 ou 6 n’ont pas éclaté. »

Jeudi 17 décembre 1914

Rien de nouveau.

Vendredi 18 décembre 1914

Edouard écrit du Nord : « Au lieu de retourner devant Ypres, nous sommes allés devant Boesinghe en Belgique où nous étions il y a un mois et ce pauvre village qui était tellement bombardé à ce moment-là ne reçoit plus rien maintenant. Il y a eu une attaque vers le fameux cabaret de Korteker et nous avons réussi. La meilleure preuve, c’est que nous avons fait une centaine de prisonniers. Il tonne fort du côté d’Ypres ».

A Nancy vient de mourir aujourd’hui une femme de 104 ans qui vivait avec sa fille.

Samedi 19 décembre 1914

On entend le canon de temps en temps. Edouard écrit : « Les Allemands se cramponnent toujours comme des diables. On ne compte plus les chevaux qu’on a abandonnés enlisés dans la boue, par suite de l’impossibilité de les en tirer. Nous travaillons des heures pour ne pas laisser dans le fossé les voitures et les caissons ».

Dimanche 20 décembre 1914

Edouard écrit : « Beaucoup de Taubes qui nous ennuient, on prépare un bon réveillon de Noël ».

Pont-à-Mousson est toujours bombardé. Les Allemands sont sur la côte de Norroy et envoient des obus tous les dimanches sur Pont-à-Mousson. L’hôpital est atteint ainsi que le cimetière.

Je vais voir aujourd’hui l’officier allemand qui a été blessé fin août près de Nancy et qui est toujours en traitement. Il a eu les deux genoux fracassés par des balles. Il a l’air distingué. Il me dit qu’il habite Magdebourg et a fait ses études à Munich à la Kriegsacademie, équivalent à notre Ecole de guerre. Il a 22 ans. Il me confie qu’Alexis lui a sauvé ses deux jambes et que, s’il avait eu affaire à un major, il lui aurait certainement coupé au moins une jambe.

La Sœur me dit qu’il est très délicat. Il dit toujours : « si cela ne vous dérange pas trop en demandant quelque chose ». Comme on lui parlait du Kaiser qui avait une main paralysée, il nous a dit : « Lorsque notre Empereur venait diner dans le château de ma Tante, on lui coupait sa viande ». Son linge est très fin, il doit être d’une grande famille. Il a écrit une lettre de reconnaissance à Alexis qui pourrait nous servir en cas d’invasion des Allemands à Nancy !

A suivre…



12/12/2014
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