61e semaine de guerre - Lundi 27 septembre au dimanche 3 octobre 1915
LUNDI 27 SEPTEMBRE 1915 - SAINT COME - 421e jour de la guerre
MARDI 28 SEPTEMBRE 1915 - SAINT WENCESLAS - 422e jour de la guerre
MERCREDI 29 SEPTEMBRE 1915 - SAINT MICHEL - 423e jour de la guerre
JEUDI 30 SEPTEMBRE 1915 - SAINT JEROME - 424e jour de la guerre
VENDREDI 1ER OCTOBRE 1915 - SAINT REMI - 425e jour de la guerre
SAMEDI 2 OCTOBRE 1915 - SAINTS ANGES GARDIENS - 426e jour de la guerre
DIMANCHE 3 OCTOBRE 1915 - LE SAINT ROSAIRE - 427e jour de la guerre
Revue de presse
- Dans les Balkans les troupes allemandes marchent contre la Serbie
- Attaques allemandes repoussées près de Vilelka
- Deux tentatives des Autrichiens pour passer la Drina sont enrayées
- Progrès sensibles des Italiens sur le Carso
- L'aventure allemande continue en Bulgarie
- La Grèce précise son attitude - La Bulgarie prépare son attaque
- L'offensive italienne continue dans la zone de Stelvio au milieu des glaces et des neiges
- Les Russes refoulent partout l'ennemi
Morceaux choisis de la correspondance
27 septembre - LUI.- Je suis content d’apprendre par ta lettre du 23 que ton voyage à Nancy ne t’a pas fatiguée et que tu es redevenue la chérie d’autrefois. Tu vois, ma Mi, qu’il ne faut pas se laisser aller, croire des choses qui n’existent pas et toujours être bien courageuse.
Eh bien, Mimi, toi qui dis que Paul se trompait, tu as dû apprendre que la fameuse offensive était déclenchée et que, tout au moins au début, elle est tout à fait victorieuse. On parle de 20 000 prisonniers faits pendant ces trois jours, 30 canons pris, etc. Enfin tout a l’air de bien aller et j’espère bien que cela va continuer. En ce qui nous concerne, nous nous contentons de retenir les Allemands de notre côté pour les empêcher d’envoyer des renforts aux points menacés. L’artillerie est donc plus active que d’habitude. Nous démolissons des réseaux de fils de fer et des mitrailleuses et l’artillerie ennemie nous répond faiblement. Elle ne doit pas être très nombreuse de notre côté et il serait possible, si cela va bien, que nous attaquions de notre côté d’ici quelques jours. Si nous pouvons faire quelques kilomètres en avant, il ne faudra pas t’étonner que mes lettres mettent plus de temps pour t’arriver, je ne pourrai d’ailleurs peut-être pas t’écrire aussi souvent, bien que je tâcherai de t’écrire un petit mot. En tout cas, ma Mi, ne parle pas de longues années et ne dis pas que cela va encore durer trois ans. Sois tranquille, tu n’auras pas de cheveux blancs quand je reviendrai. Mais aurais-tu blanchi et les rides auraient-elles apparu sur ton joli front que je t’aimerai toujours, tu le sais bien et que tu seras toujours ma Mimi.
28 septembre - ELLE.- Que se passe-t-il chez toi, voilà 6 jours que je n’ai rien de toi. Je veux ne pas m’inquiéter et m’efforce de croire à une censure trop sévère, à une retenue des lettres venant du front, pouvant donner des nouvelles des combats. Pourtant Thérèse en reçoit de son mari, mais peut-être son secteur est-il moins dans l’attaque. Je fais volontiers ce sacrifice d’être ainsi privée de tes chères nouvelles, si par la suite tu m’annonces une avance certaine de vos canons, la fuite de l’ennemi et le commencement de la victoire.
J’ai reçu hier une lettre de Marie Paul, retour à Paris. On voit qu’elle n’a pas vécu en France depuis le début de la guerre, elle trouve tout étonnant et pénible : Paris est triste, maussade, les employés sont grincheux, les appartements fermés très nombreux, pour envoyer un télégramme il faut présenter des pièces d’identité. Que dirait-elle si, comme nous, elle ne pouvait même pas télégraphier, ni téléphoner, si elle n’avait pas de boucher et doive courir à Epinal et ailleurs pour faire ses provisions de viande. Je trouve au contraire que dans cette guerre on n’a eu aucune privation à supporter (pour les civils, j’entends), bien des petits ennuis sans doute mais rien d’excessif.
Nous avons eu hier un jeune Parisien à dîner, il est à Cheniménil comme conducteur et nous avait été recommandé par un marchand de papier. Il est cousin de Mr Chabert, semble être de très bonne famille, son père est notaire à Paris, il est bien élevé et gentil et gai. Nous avons joué au bridge aux enchères, il nous a donné une leçon dont nous avions bien besoin n’ayant plus joué depuis un an et demi.
Je t’ai envoyé tes chaussures samedi, mais je crains bien que dans le brouhaha actuel elles ne te soient pas remises.
Marie M. me demande de lui envoyer à Nancy la partition de Tristan, chant et piano. Elle aura tant de liberté qu’elle travaillera et apprendra ce qu’elle pourra par cœur. C’est excellent au point de vue musical.
29 septembre - LUI.- Je reçois ta bonne lettre du 25 et suis content d’avoir de bonnes nouvelles des enfants chéris. Tu diras à Dédé que je suis heureux d’apprendre qu’il fait mieux ses devoirs. Voici l’école qui va recommencer. Je compte sur lui pour y bien travailler car je suppose, puisqu’il va très bien en ce moment, que tu vas l’y renvoyer. Et notre petite Noëlle, qu’en fais-tu ? Elle serait peut-être contente elle aussi d’aller de temps à autre à l’école pour s’amuser avec les gamines. Tu ne me dis rien de notre petit Robert. J’espère qu’il va quand même bien et qu’il n’a plus ses petites poussées de température. Si je me rappelle bien, le docteur Hadot t’avait dit de lui écrire. Ce n’est pas que ce soit nécessaire mais, puisqu’il s’est occupé de lui, c’est la moindre des choses qu’on le renseigne.
Paul a parfaitement raison de faire marcher les autos. Il est inadmissible que des usines s’engraissent pendant que d’autres ne peuvent marcher sous prétexte qu’on y a installé un parc d’autos. L’état devrait payer dans tous les cas les intérêts des obligataires. Es-tu sûre que le chiffre que tu donnes pour l’hôtel du Mt Dore soit exact ? Comment va-t-on faire pour payer tout cela ?
Notre offensive est un peu calmée et cela se comprend. Il faut espérer qu’on va continuer. As-tu vu dans les journaux qu’on attribuait le succès surtout au violent bombardement de l’artillerie. C’est sûr, quand on aura des canons et des munitions en masse, il n’y a pas de tranchées qui tiennent. Les soldats bombardés de cette façon ne se possèdent plus et ceux qui ne sont pas bien se rendent, c’est ce qui explique le grand nombre de prisonniers. Espérons toujours, ma Mi, sans toutefois être trop impatients.
1er octobre - ELLE.- J’ai enfin reçu deux lettres de toi datées du 21 septembre et du 27. Tu dois avoir bien à faire, mais on est content de se dire que ce qu’on fait est bien fait et, quand on avance, rien ne coûte. Je regrette bien que Zemb t’ait quitté car je te savais en confiance avec lui et c’est désagréable de faire de nouvelles écoles. Il y a certainement de tes lettres égarées car tu me dis m’avoir parlé de quelque chose que j’ignore complètement, mais cela n’a pas d’importance puisque tu me dis te trouver mieux qu’avant.
Malgré le temps très froid nous allons tous bien et sommes enchantés des bonnes nouvelles des communiqués. Dieu veuille qu’on continue. Rien de nouveau ici, nous n’avons pas bougé et n’avons donc aucune nouvelle de personne.
Faisons des vœux ma Mimi pour que notre offensive réussisse et que la durée de la guerre soit abrégée. Il ferait si bon se retrouver et je suis bien en mal de vous tous.
1er octobre - LUI.- Je reçois ta bonne lettre du 28 écoulé et suis bien navré que tu n’aies rien reçu de moi depuis six jours. Tu sais que je t’écris tous les deux jours et par conséquent c’est un simple retard de la poste et il ne faut pas s’étonner par le temps qui court. Je t’ai dit aussi qu’il serait possible que je t’écrive peut-être moins souvent si nous quittions Soissons mais cette éventualité ne me paraît pas près de se réaliser. Nous avons montré assez d’activité ici pendant quelques jours mais, depuis hier, nous ne faisons plus rien. C’est un tort à mon avis car, si on ne retient pas les Boches, ils iront renforcer leurs camarades qui se battent en Champagne.
On voit que Marie Paul est restée en Suisse depuis un an. Il est évident qu’elle trouve du changement à Paris, bien qu’elle ne puisse tout de même pas se plaindre, car à Paris il y a encore plus de gaieté qu’ailleurs et on trouve en somme tout ce que l’on veut.
Toujours très enchanté des nouvelles que tu me donnes de toi. Je voudrais bien aussi que mon petit Robert reprît des forces. Si seulement le docteur Haushalter pouvait venir encore à Docelles ! Enfin, enfin, tout cela s’arrangera et, bien souvent en hiver, il y a un beau soleil qui remontera notre cher petit.
J’attends tes chaussures, je ne dis pas avec impatience car j’en ai encore une paire très bonne. Mais enfin je serai content, si nous devons partir, d’en avoir deux paires pour passer l’hiver.
Faisons des vœux ma Mimi pour que notre offensive réussisse et que la durée de la guerre soit abrégée. Il ferait si bon se retrouver et je suis bien en mal de vous tous.
2 octobre - ELLE.- Les correspondances fermées subissaient un tel retard cette semaine que j’ai préféré t’envoyer des cartes pour que tu ne sois pas privé de nouvelles, mais comme le service semble se réorganiser d’une façon plus rapide puisque j’ai eu hier ta lettre du 27, je t’écris aujourd’hui un peu plus longuement. Je suis bien contente que les communiqués s’abstiennent de parler de votre région, cela me fait espérer que la lutte n’y est guère plus chaude que d’habitude.
Tes nouvelles fonctions te donnent bien à faire et beaucoup de mouvements. Si cela n’arrive pas à la fatigue exagérée, c’est bien bon pour toi puisqu’on te recommandait ces années dernières beaucoup d’exercice.
J’espère bien au contraire que tu seras promu sous peu, ce n’est franchement pas la peine d’en avoir la fonction sans en avoir les honneurs et tu sais que je serais très fière quand tu reviendras en permission de me promener au bras d’un beau commandant. Tu vois, j’aime la gloire et le panache. Pour peu que la guerre dure encore un an ou deux, tu nous reviendras colonel, ce sera épatant. Mais au fond, je donnerais beaucoup pour que tout cela finisse et que je puisse serrer dans mes bras le simple capitaine que j’aime.
Nous attendions tous les jours la grande annonce de la percée, mais rien ne vient encore, il faut à nouveau nous armer de patience et durer tristement comme nous le conseillent tous les bons apôtres, journalistes et autres.
Nous avons eu à dîner plusieurs fois cette semaine un jeune homme de Paris qui nous avait été recommandé par un marchand de papier. C’est un cousin de Mr Chabert de Gérardmer, il est très gentil, nous avons joué au bridge aux enchères, c’est un aimable joueur qui ne vous ahurit pas d’injures quand on se trompe comme les Laroche-Joubert. Il s’attend à quitter Cheniménil d’un jour à l’autre.
Marie M. doit être rentrée à Nancy, elle pensait s’installer dans le logement de Mère et voilà que les Weissenburger ne veulent pas allumer le calorifère. Marie ne veut donc pas y rester et elle va louer autre chose ou s’installer à l’hôtel. Elle a donc 4 maisons, celle de Mère, leur maison rue de la Ravinelle, Bayon et Gérardmer et elle trouve moyen de n’aller dans aucune. Enfin, Adrien fait des demandes pour quitter Nancy et aller à Paris, c’est, je pense ce qui plairait le mieux à Marie.
Gravures du Petit Journal - Supplément illustré - 03/10/1915 (N° 1293)
Les jeunes princes sur le front - Le prince Léopold, duc de Brabant, héritier du trône de Belgique… et simple soldat, rend les honneurs au roi son père
L’’Echo Belge’ rapporte : « Le roi Albert, en compagnie d’un officier d’ordonnance, se promenait aux environs de nos lignes. Tout à coup, au détour d’un chemin, il croisa une sentinelle qui, prestement, prit la position et présenta les armes. Le roi salua et continua sa route. C’était le prince Léopold, son fils, qui venait de lui rendre les honneurs ». Tout le monde sait que, depuis quelques mois, le jeune prince Léopold fait partie de la vaillante armée belge. Bien qu’il n’ait pas encore quatorze ans, il a voulu s’enrôler dans un des plus glorieux régiments, un de ceux qui, dans la résistance belge à l’invasion et dans les combats sur l’Yser, se sont le plus distingués. Ce fut pour les braves soldats de ce régiment une récompense. Le roi voulut que son enfant fût leur camarade. « Je vous confie mon fils », leur dit-il, en leur présentant le jeune prince. Et notre confrère Henri Malo, qui a interviewé sur le front « le plus jeune soldat de l’armée belge », nous dit : « Que l’on ne croie pas de la part de l’héritier du trône de Belgique à une platonique manifestation. Le prince, dont le commandant Preudhomme assura solidement l’instruction militaire, a été placé dans le rang comme n’importe quel conscrit. Non seulement, il suit assidûment les exercices de la compagnie à laquelle il est affecté, mais encore, à l’exemple du roi, qui a tous les courages, de la reine qui a tous les dévouements, il a pris sa part de service jusque dans les tranchées ». Et notre confrère rappelle justement à propos du jeune et vaillant prince le vers fameux de Corneille, qui ne trouva jamais plus juste application : « La valeur n’attend pas le nombre des années ».
Le prince Humbert, héritier du trône d’Italie, acclamé par les troupes italiennes sur les lignes de l’Isonzo
Le prince héritier Humbert vient de faire, en compagnie de son gouverneur, le commandant Bonaldi, une visite de trois jours sur le front. Il a accompagné le roi à travers les lignes, où les soldats l’ont accueilli avec un grand enthousiasme. En passant, à son retour, par les villes de l’Isonzo inférieur devenues récemment italiennes, les populations reconnaissant l’enfant, se livrèrent à une manifestation de loyalisme et d’affection, les femmes jetant des fleurs en poussant les cris de : « Vive notre petit prince ! » C’est pour fêter ses douze ans que le jeune prince est allé sur le front. Son père a voulu que fût ainsi célébré son anniversaire. Et le petit prince en a ressenti la joie la plus vive. Le « principe », comme on l’appelle en Italie, est en effet le digne descendant des rois-soldats de la dynastie de Savoie. Il se passionne pour toutes les choses de la guerre. Il demande constamment à ses précepteurs de le renseigner sur la marche des événements ; il veut être au courant de tout ce qui se passe sur le front italien, et s’intéresse surtout au sort des blessés auxquels il écrit pour les consoler et les encourager. On conçoit que les populations et les troupes, qui connaissent l’âme généreuse et vaillante de l’enfant royal, aient fait au « principe » l’accueil le plus enthousiaste.
Les instantanés de la guerre (photos)
Un Maurice Farman avec sa mitrailleuse
Projecteur électrique monté sur automobile
Une automobile blindée
Canon de 75 sous son abri
Mortier de 220 en position
Un campement sous bois
Un coin de tranchée
La cagnia du docteur
L'aumônier, le rabbin et le pasteur photographiés en groupe
En sentinelle
Les instantanés de la guerre (photos)
Ruines de Flirey
Un barrage sur une route en Argonne
La distribution du bon pinard
Le train qui ravitaille les troupes en eau potable
Une batterie de 155 rimailho se rend sur le front
On fait de la musique aux poilus pendant la piqûre
La tombe d'un soldat français décorée d'obus allemands non éclatés
Mitrailleuse dans une tranchée allemande au front russe
Le fabricant de bagues et son corbeau familier
Lancement de bombes à l'aide de crapouillots
Thèmes qui pourraient être développés
- Télégraphe - Pour envoyer un télégramme il faut présenter des pièces d'identité - Interdiction de télégraphier et de téléphoner
- Jeu du bridge aux enchères
- Musique - Partition de Tristan, chant et piano
- Artillerie - Bombardement des tranchées, violent bombardement de l'artillerie - Les soldats bombardés ne se possèdent plus, d'où un grand nombre de prisonniers
- Offensive
- Belgique et Italie - Les jeunes princes sur le front (LPJ Sup)
- Allemagne - Les carnets de guerre des combattants (LPJ Sup)
- Les instantanés de la guerre (Photos dans LPJ Sup)
- Conseils pratiques - Cheveux, barbe, poils, … (LPJ Sup)
- Religion - Fête religieuse - Saints Anges Gardiens - 2 octobre
- Religion - Fête religieuse - Le Saint Rosaire - 3 octobre
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