14-18Hebdo

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Souvenirs de guerre 1914-1919 (Paul Boucher) - Ch 13-2 –L’état-major, Champigny, Verdun, Lunéville

Document transmis par Renaud Seynave, son petit-fils - 20/03/2018

 

Paul Boucher 7-3 Image3 PB et son cheval Goeland.jpg
Paul Boucher et son cheval Goéland

 

Mardi 17 juillet 1917

Nous embarquons à Champigny après une marche pénible que je commande. Le train ne nous emmène que jusqu’à Longpart et de là à Saint Rémy-Blanzy, village de grosses cultures. Nous sommes bien fatigués des cantonnements continuels, cependant nous recevons un accueil aimable.

 

19 juillet, le général Brissaud qui passe nous voir nous annonce quelques jours à consacrer à la remise en main pour une attaque probable bien montée. J’aime encore mieux cela que qu’être attaqué… mais je m’en passerais bien, nous faisons des exercices de tir.

 

(Note de Paul Boucher dans son carnet : après-midi, tirs innombrables ratés avec un personnel médiocre)

 

Le samedi 21, on nous annonce le passage probable du général Pétain, vite on commence à faire balayer le village… contre ordre, il ne passera pas à Saint Rémy-Blanzy mais à Hartennes, village voisin où est cantonné le 27e BCA. On nous ordonne de nous y rendre : tous les officiers et tous les fanions de Cie, nous à cheval, eux en calèches de toutes sortes, ce n’est pas loin.

 

Tous les officiers de la division, tous les fanions et le drapeau des chasseurs sont là. Le 27e BCA forme le carré avec deux escadrons de dragons. Le groupe des officiers, 290 environ forme un côté. On va remettre quelques décorations et on appelle les officiers légionnaires pour la cérémonie. Nous demeurons dans notre coin lorsque je vois accourir Regard, capitaine-adjoint du colonel Payard qui commande le groupe et m’appelle en me disant : « Y-a du bon, venez ».

 

En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, je me trouve devant Pétain, majestueux et simple dans son uniforme bleu horizon sans la moindre décoration. A ses côtés, le général Lecointe qui commande le CA, le général Brissaud, le commandant Dupont qui a l’air tout heureux.

 

Je suis au garde à vous devant Pétain qui me dit :

 

« Capitaine, vous avez six citations, vous êtes au feu depuis 1914, vous avez appartenu à ce beau régiment, le 152e RI, vous serait-il agréable que je vous ajoute la Légion d’honneur ? ».

 

Aussitôt dit que fait, le commandant Dupont qui avait tout machiné me pose à côté de ceux qui allaient être décorés, donne sa croix car faute d’insigne, cela allait rater et, par un temps magnifique, devant une troupe d’élite, je me vois fait chevalier de la Légion d’honneur sans proposition préalable. Le général Brissaud me sourit d’un air fin. C’est la compensation d’Unchair. (Note de Renaud Seynave : Lire les 4 et 5e parties du chapitre 12)

 

Texte de la citation

 

Ordre du 21 juillet 1917 N° 5399

« Chevalier de la Légion d’honneur »

Boucher Paul Henry, capitaine du 68e Chasseurs Alpin, commandant la Compagnie de mitrailleuses
« Brillant officier au front depuis le début de la campagne a donné dans toutes les actions où il a pris part, l’exemple de la bravoure et de l’abnégation.

Lors des combats au Chemin des Dames d’avril à juin 1917. Six fois cité à l’ordre »

La nomination ci-dessus comporte l’attribution de la croix de guerre avec palme.

 

 

Après le défilé traditionnel, mes camarades me congratulent de bon cœur. Puis le général Pétain nous réunit et dit à peu près ceci :

 

« Pour la première fois, je viens de remettre une décoration sans proposition, c’est une joie d’avoir pu décorer de mes mains des officiers et hommes de troupe de la 66e division. J’ai mis en vous toute ma confiance, sachez que vous pouvez compter entièrement sur moi ».

 

Note de Renaud Seynave : Texte intégral de l’allocution prononcée par le général en chef Pétain devant tous les officiers de la 66e division des chasseurs le 21 juillet 1917 à Hartennes (Aisne).

 

« Je suis heureux d’avoir pu venir jusqu’à vous, jusqu’à la 66e division d’élite, division de chasseurs. Vous avez inspiré jusqu’à présent une sainte terreur aux Boches et vous continuerez à le faire, j’en ai la certitude.

 

Au cours de votre défilé triomphal à travers Paris, on vous a couvert de fleurs, il ne vous reste maintenant qu’à aller cueillir des lauriers qui vous attendent, là-bas dans les tranchées ennemies.

 

D’ordinaire, lors de mes visites, je faisais quelques recommandations. Le moral et l’attitude superbe de vos troupes m’en dispenseront aujourd’hui. Pour la première fois, je viens de remettre une décoration sans proposition, c’est une joie pour moi d’avoir décoré de mes mains des officiers et des hommes de troupe de la 66e division. »

 

Paul;Boucher 13-2 Image 2 Décoré par Pétain.jpg

Le général Pétain remet de la croix de chevalier de la Légion d’honneur au capitaine Paul Boucher

le 21 juillet 1917 à Hartennes dans l’Aisne. Le commandant Dupont est derrière le général Pétain.

 

 

Puis ce fut la route sur Saint Rémy, retour que je fis en calèche trop ému pour enfourcher Goéland, mon grand cheval. A mon arrivée, les sous-officiers et caporaux de la Cie m’attendent à mon cantonnement avec une énorme gerbe de fleurs.

 

Jour magnifique pour moi !!!

 

Le 22, j’arbore mes décorations, passe en revue la Cie et remets la croix de guerre à son fanion, attention du commandant. J’améliore sensiblement l’ordinaire. Mais on parle d’un départ prochain. Etape par Courcelles, grand château ancien appartenant à la famille Prioux, papetiers amis des miens. Monsieur P. Prioux repose au cimetière à côté et je salue sa tombe.

 

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Journal de marche du 68e (En date du 21 juillet… le général en chef remet la croix de chevalier de la Légion d’honneur

au capitaine Boucher, commandant de la Cie de mitrailleuses…)

 

Notes prises par Paul Boucher dans son petit carnet :

Dimanche 22 juillet 1917 Saint Rémy

J’arbore ma batterie de cuisine, croix de guerre avec deux palmes, cinq étoiles et croix de la légion d’honneur, c’est beaucoup pour le paisible bourgeois que je suis.

Messe, repas, courrier, diner, repas amélioré à la Cie à laquelle j’ai donné 200 francs.

Remise de la croix de guerre à la Cie.

Mais on parle de départ prochain.

 

 

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Décorations miniatures ayant appartenu à Paul Boucher : Croix d’officier de la Légion d’honneur, Chevalier le 21 juillet 1917, Officier le 25 décembre 1929, Croix de guerre 1914-1918 avec 2 palmes, trois étoiles d’argent et deux étoiles de bronze, Croix de guerre belge.

 

Étoiles : Citation à l'ordre du régiment : bronze, Citation à l'ordre de la brigade : bronze, Citation à l'ordre de la division : argent, Citation à l'ordre du corps d'armée : vermeil

Palmes : Citation à l'ordre de l'armée : bronze, 5 citations à l'ordre de l'armée : argent



23/03/2018
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