Cornimont, village frontière, dans la Grande Guerre - 5 - Un village de cantonnement
Danièle Grandemange – 19-12-2017
Mais la première des réquisitions et la plus visible dans cette ville de cantonnement, c’est celle des logements. Dès le début de la guerre des listes d’habitants ont été élaborées, par quartiers, avec pour chaque foyer le nombre d’officiers, le nombre de soldats et le nombre de chevaux qu’il pourra héberger. Et cela ne désemplit pas durant toute la guerre. Les usines et les écoles sont également des lieux de logement.
Doc 20 : Liste de cantonnement
C’est une charge supplémentaire pour les habitants, même si une indemnité est prévue pour ceux qui reçoivent des militaires.
Vous vous demandez peut-être comment cette cohabitation a été perçue par les Counehets. Il semble qu’elle se soit bien passée. Plusieurs familles ont des photos de leurs ancêtres posant avec des soldats de passage chez eux.
Doc 21 - ADV 10Fi5/0036
Cornimont – Deux civils aux côtés d’un chasseur alpin en uniforme – 1915/16.
Une seule plainte a été déposée par une habitante de Xoulces contre eux et c’est à propos d’un incident minime. Il faut dire que les habitants des Hautes-Vosges sont habitués au passage de troupes dans leur commune. Dans les Archives communales, un texte de 1897 comporte l’expression « d’habitude, les officiers utilisent la salle… » en parlant de troupes de passage. Le patriotisme et le souci d’aider l’armée à chasser l’ennemi expliquent également ces réactions.
Les enfants sont souvent les premiers à accueillir les soldats de passage. D’abord, ils sont curieux de nouveautés comme tous les enfants. D’autre part, leurs salles de classe sont parfois réquisitionnées pour loger les arrivants et de ce fait, n’ont plus de cours. Les tables et les bancs sont poussés contre les murs et on dispose de la paille sur le sol. Après leur départ, le garde-champêtre ramassait la paille et l’envoyait à la rivière. Les jours suivants, en revenant dans leur salle de classe, les enfants se rendaient compte que tous les poux n’étaient pas partis à la rivière avec la paille. (Anecdote racontée par Madame Curien dans son livre « Au temps du village »).
Une autre raison pour les enfants de rechercher la compagnie des troupes, était le bon accueil qu’ils recevaient. Les soldats étaient heureux d’être au contact de civils. Les cuisines roulantes étaient installées dehors et parfois, ces enfants qui ne mangeaient pas tous les jours à leur faim, pouvaient recevoir un petit morceau de viande sur un bout de pain ou un peu de soupe dans une gamelle. Plusieurs témoignages vont dans ce sens.
Sur toutes les photos représentant les régiments en cantonnement dans leur ville, on constate que les habitants se pressent nombreux pour assister aux prises d’armes et aux défilés,
Doc 22 - ADV 10Fi5/0016
Sur la place de la Pranzière, les hommes du 6e bataillon de chasseurs alpins sont passés en revue.
A l’arrière-plan la Grand Roche – 11 mai 1916.
Doc 23 - ADV 10Fi5/0018
Inspection du 35e RI par le général de Villaret : prise d’armes sur la place du village. 16 juin 1916.
Doc 24 - ADV 10Fi5/0008
Revue du 5e bataillon territorial de chasseurs devant l’église de la commune.
Au premier plan, un officier à cheval salue la foule. 21 mars 1916.
Surtout lorsque le président Poincaré est de passage à Cornimont.
Doc 25 - ADV 10Fi5/0023
Le président de la République Raymond Poincaré s’apprête à remonter en voiture devant deux officiers.
A l’arrière-plan, la foule. 10 août 1916.
Quelques scènes de la vie de tous les jours avant de replonger dans l’enfer du front.
Doc 26 - ADV 10Fi5/0022
Les pains de ration. Derrière la mairie, des hommes du 35e RI déjeunent. 22 juin 1916.
Doc 27 - ADV 10Fi5/OO01
35e RI – Un soldat se fait raser la barbe chez le coiffeur de la 9e Compagnie. 1916.
Doc 28 - ADV 10Fi5/0027
Le courrier : un homme du 35e RI écrit une lettre.
Doc 29 - ADV 10Fi5/0063
Vaguemestres du 2e d’artillerie de montagne. Dépouillement du courrier devant l’église et sous le regard attentif d’un territorial. Lettres et colis destinés aux Poilus sont triés.
Les troupes en cantonnement à Cornimont sont presque exclusivement françaises. Des troupes américaines s’installeront en juin 1918 et resteront jusqu’en janvier 1919. Ce sont surtout des forestiers.
(Compagnie F, 10e Bataillon, 20the Engineers Regiment. Cette compagnie F comprenait 429 hommes)
Plusieurs scieries ont été ouvertes par ces bataillons à Vagney, Cornimont, La Bresse.
On peut noter aussi un dépôt de la Croix Rouge américaine d’août à début octobre 1919. Les membres logeaient chez l’habitant. Une Counehette m’a raconté que son ancêtre avait été soignée de la grippe espagnole par un infirmier américain qui était hébergé dans sa famille. Elle a été guérie et lui en est restée très reconnaissante.
Une photographie, de mauvaise qualité, montre une musique américaine qui défile le soir du 11 novembre 1918 dans les rues de Cornimont.
A suivre…
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