194e semaine de guerre - Lundi 15 avril au dimanche 21 avril 1918
LUNDI 15 AVRIL 1918 - SAINTE ANASTASIE - 1352e jour de la guerre
MARDI 16 AVRIL 1918 - SAINT BENOIT-JOSEPH LABRE - 1353e jour de la guerre
MERCREDI 17 AVRIL 1918 - SAINT ANICET - 1354e jour de la guerre
JEUDI 18 AVRIL 1918 - SAINT APOLLONIUS - 1355e jour de la guerre
VENDREDI 19 AVRIL 1918 - SAINTE EMMA - 1356e jour de la guerre
SAMEDI 20 AVRIL 1918 - SAINT SULPICE - 1357e jour de la guerre
DIMANCHE 21 AVRIL 1918 - SAINT ANSELME - 1358e jour de la guerre
Revue de presse
- Le général Foch commandant en chef des armées alliées en France
- La démission du comte Czernin - Ne pouvant s’expliquer, le Tchèque renégat se retire
- La controverse Clemenceau-Czernin - Un nouveau télégramme de Charles à Guillaume
- La pression ennemie sur le secteur d'Ypres
- Le baron Burian succède au comte Czernin
- Bolo a été fusillé à Vincennes
- Important changement ministériel en Angleterre - Lord Milner ministre de la Guerre - Lord Derby ambassadeur à Paris
- Mgr Luçon à l'Académie française - Mgr Baudrillart retire sa candidature
- La bataille des Flandres marque un temps d'arrêt
- L'alimentation de Paris - Un office central des viandes
Morceaux choisis de la correspondance
4 avril 1918 - 17 avril 1918 – Georges Cuny - Angoulême puis convalescence à Docelles
Nous passons de mauvaises nuits, tantôt à cause du bombardement par obus, tantôt à cause des gothas. Notre quartier n’a pourtant pas souffert mais les victimes à la maternité et dans le quartier St Pierre St Paul, rue de Rivoli, sont nombreuses.
16 avril - Marie Paul Cuny (Paris) à Mimi Cuny, sa belle-sœur.- Nous passons de mauvaises nuits, tantôt à cause du bombardement par obus, tantôt à cause des gothas. Notre quartier n’a pourtant pas souffert mais les victimes à la maternité et dans le quartier St Pierre St Paul, rue de Rivoli, sont nombreuses. Hier soir l’obus est tombé près de mon ancienne clinique, dans une usine, pertes humaines et matérielles.
Les boches tirent maintenant sur Paris la nuit avec leur gros canon.
17 avril - ELLE.- Ce matin, au second courrier est arrivée une lettre du Cap. Machiels, qui t’annonçait en date du 12 que les 4 jours de repos étaient déjà finis et qu’ils repartaient pour le front par étapes, qu’il t’écrirait ultérieurement mais que dès à présent il pouvait t’indiquer le Bourget comme gare régulatrice. Je t’ai lancé un télégramme de suite pour t’en prévenir et espère que tu l’auras reçu à temps pour t’éviter des allées et venues dans Paris et hors de Paris à la recherche de ta division.
J’ai donné mes leçons de piano ce matin aux deux grands et André a appris sa leçon de latin et fait son devoir entre 11 heures et midi et de 1 heure ½ à 2 heures ¼. Il avait à apprendre un verbe « capio » qui tient de la 3ème et 4ème conjugaison. Il avait l’air plein de bonne volonté et ils rentrent tous les deux avec de bonnes notes de Mlle Marchal.
Quoiqu’ils soient parfois bien diables et assommants, on est content de les avoir ces petits pour occuper l’esprit dans les jours sombres comme celui-ci, où on est d’un coup privé de son bonheur. Je te suis en pensée tout le long de ton voyage, j’ai vu dans le journal que les boches tirent maintenant sur Paris la nuit avec leur gros canon, pourvu qu’il ne t’arrive rien.
Je t’envoie mon adoré tout mon amour dans un long baiser. Ta petite Mi.
Henry a recherché sa section pendant quatorze jours.
19 avril - ELLE.- Cette lettre t’arrivera-t-elle pour t’apporter mes vœux de bonne fête pour le 23 avril. Te voilà déjà bien loin de nous, depuis deux jours que tu nous as quittés, et je pense à toi à toute heure, me demandant si tu n’es pas trop fatigué, si et où tu as retrouvé ta division. Il est arrivé une lettre d’Henry hier, je te la joins, tu verras qu’il a recherché sa section pendant quatorze jours. Voinson m’écrit aussi la même chose. J’espère que pareille mésaventure ne se produira pas pour toi.
Nous sommes allés hier à Epinal, j’ai emmené un jeune homme de l’usine qui est gentil, pour lui apprendre à conduire. Tous ces essais ne font pas de bien à la voiture, car les changements de vitesse sont toujours raides et bruyants, les coups de freins trop brusques.
Le soir, on a renvoyé Faron chercher le monteur de la coupeuse, et on commence le montage aujourd’hui. Nous avons retrouvé la correspondance de Georges avec cette maison et cela nous amusait de voir la différence de politesse, d’obligeance des fournisseurs d’avant-guerre et ceux de maintenant, tels que Westinghouse qui vous étranglent à l’avance et ne vous donnent même pas le temps de respirer. Maman a eu un moment d’affolement en apprenant que le monteur arrivait si vivement et en lisant dans la correspondance qu’on parlait de fondations et massifs. Enfin on s’en tirera comme toujours. L’usine marche comme on l’avait organisé avant ton départ, la machine fait même plus de 12 heures. Si cela pouvait durer ainsi en attendant l’électrification, cela ne serait pas trop grave ce manque de houille, mais gare la sécheresse.
André a fait plus attention à ses leçons de piano aujourd’hui et hier, et son devoir de latin fait mercredi était bien.
Bonnes tendresses mon mari chéri de ta petite femme qui voudrait t’avoir près d’elle pour te redire tout son amour et ses vœux de bonne fête. Ta Mi.
20 avril - ELLE.- J’ai reçu à l’instant ta carte adressée de Paris et suis contente des bonnes nouvelles que tu me donnes de ta santé. Pourvu que la reprise de la vie active ne te fatigue pas trop.
Figure-toi que Maman a reçu aussi ce matin une lettre d’Abel Ferry qui lui disait avoir vu Maurice dans les tranchées de la Somme, en bon état : lèche naturellement, bel officier, brave, etc. etc., ils ont beaucoup causé ensemble. Abel soi-disant aurait fait grand cas de tout ce que lui a dit Maurice et en fera usage auprès de ceux que cela peut intéresser. Pourvu que Maurice ait été prudent dans ses paroles, avec un impulsif comme lui, on peut toujours craindre qu’il aille trop loin. Je pense que ce cher Abel est un malin, il aura flatté notre cher frère qui y est sensible comme presque toute l’humanité et aura ainsi gagné un électeur de plus.
Maguy nous écrit des lettres enthousiasmées de Germaine, « jeune fille si bien, si charmante en tous points, quel dommage que notre frère ne puisse la voir, il reviendra trop tard ». En effet, c’est bien dommage, mais nous ne pouvons honnêtement rien faire et dire, nous ne savons pas assez ce que l’avenir nous réserve, dans quel état Georges reviendra, ce ne serait pas bien de faire attendre cette enfant-là et puis qu’ensuite le mariage ne puisse se faire.
J’aurais bien voulu que vous ne soyez pas si près du front mouvementé, on va donc vous y lancer sous peu.
Maman ira dans huit jours à Paris et rapportera le Giffard et ton costume.
La neige est tombée hier, cela rappelait le temps que vous avez eu l’an dernier pour attaquer sur l’Aisne. On a même rallumé le calorifère pour réchauffer un peu la maison.
Robert a eu une très mauvaise journée hier, il a reçu deux fouettées, été mis au lit entre 1 heure et 2 pour le calmer et à 6 heures comme punition, tout à fait méchant et impoli pour tout le monde, Maman, Grand’Mère, Mlle Renard, les bonnes, chaque personne qui s’en occupait avait son invective. J’espère qu’aujourd’hui sera meilleur.
Mes pauvres camarades et mes pauvres hommes n’ont pour ainsi dire pas eu de repos depuis bientôt quatre mois.
20 avril - LUI.- J’ai enfin retrouvé mon groupe aujourd’hui matin. Comme je te l’ai écrit à Paris, j’ai été jeudi matin à Mantes où se trouvait le Commissaire Régulateur qui m’a annoncé que ma division étant à tel endroit, je n’avais pour la retrouver qu’un train le lendemain à 6h40 le matin. Voyant cela je suis retourné à Paris passer l’après-midi. J’avais vu sur les journaux du matin qu’on jouait Louise en matinée. Tu peux penser que je n’avais garde de manquer pareille aubaine. Je suis donc allé entendre Louise. Je n’ai pas besoin de te dire combien j’ai été enthousiasmé, moi qui n’avais pas entendu de bon orchestre depuis quatre ans j’ai été ravi. Tous les chanteurs et chanteuses étaient d’ailleurs parfaits, de sorte que c’était délicieux. Je suis rentré le soir à Mantes et suis parti hier matin à la recherche de mon groupe. On m’avait indiqué qu’il devait être dans un petit village où je suis arrivé vers quatre heures de l’après-midi. Le renseignement était faux. Il était un peu plus au nord. Heureusement j’ai pu téléphoner à l’AD qui m’a fait prendre ce matin en auto dans une ville assez importante et m’a emmené ici dans un village à une dizaine de kilomètres au NO de cette ville.
Mon groupe a quitté Verdun le 25 mars et depuis cette époque a voyagé de côté et d’autre en ayant eu en tout et pour tout huit jours de repos. Aujourd’hui même il avait encore fait une rude étape. J’ai trouvé tout le monde, hommes et chevaux, un peu fatigué, cela se conçoit. A la suite des évacuations on m’a donné 3 nouveaux officiers dont un Lt qui remplace Grosperrin, ancien X et qui m’a paru fort bien. Les deux autres sortent de Fontainebleau et paraissent dévoués et intelligents. Bonnier enfin est définitivement classé au groupe et me servira d’orienteur, le colonel préférant m’a-t-il dit mettre Morize (que j’ai trouvé hier dans le train) dans une batterie afin de pouvoir lui donner le plus tôt possible le troisième galon. Comme personnel, mon groupe a été presque renouvelé avec des jeunes gens de la classe 18. Mes officiers en sont contents jusqu’alors et prétendent que tout ira bien. J’espère que demain nous resterons ici, l’infanterie me dit-on étant très fatiguée, ce qui me permettrait de me remettre plus facilement au courant. J’ai retrouvé toutes mes affaires en ordre. A part quelques petits objets de toilette rien ne manque. Dans toutes mes pérégrinations, j’ai rencontré le Lt Saivuaeb des Marocains, tu sais, il va bien et m’a chargé de ses respects pour toi.
Ma petite Mie je pense souvent aux bons moments que nous avons passés ensemble et, quand je vois mes pauvres camarades et mes pauvres hommes qui n’ont pour ainsi dire pas eu de repos depuis bientôt quatre mois, j’estime que j’ai eu de la chance.
J’espère que les chéris ont été bien sages. J’ai été si content de les voir. Je les embrasse avec toi de tout cœur.
Le trafic est repris, mais le charbon n’arrive pas.
21 avril - ELLE.- Ces enfants sont vraiment agaçants parfois et, si on ne se retenait, on leur donnerait quelques bonnes claques. André a un gros rhume de cerveau et je ne le laisserai pas sortir aujourd’hui pour que ce rhume ne tombe pas sur la gorge. On va le faire remplacer pour servir la messe, Robert ira avec un autre gamin. De cette façon, il sera remis pour demain et pourra reprendre la classe. Monsieur Robert a été un peu plus sage hier, il avait dompté sa méchanceté et sa colère. Noëlle est vraiment bien plus facile.
Maman a eu bien de l’ennui hier. En arrangeant toutes ses pièces de coupeuse pour le montage, le monteur s’est aperçu qu’elle avait été commandée à l’envers, c’est-à-dire que la transmission n’est pas du bon côté, Georges a dû avoir une aberration en la commandant, de sorte qu’on est obligé de la mettre à droite de la salle au lieu de gauche comme on le pensait. Mais cela changeait tous les projets. Le monteur dit qu’il faut surtout bien arranger celle-là sans s’inquiéter des anciennes, prétendant qu’on ne les fera plus guère marcher après avoir essayé la nouvelle. Les anciennes font
En ce moment, on fait du papier ordinaire et on arrive à faire marcher la machine 16 ou 17 heures, les meules travaillent 24 heures, comme la pâte n’a pas besoin d’être pilée longtemps, une seule pile suffit pour la machine.
Le trafic est repris, mais le charbon n’arrive pas. La veille du jour où il a repris, Paul Antoine a envoyé des bœufs pour chercher du fil à Cheniménil, Cheniménil avait envoyé Drach chercher des tubes à Luxeuil. L’oncle Paul avait envoyé aussi des voitures porter ou chercher je ne sais quoi à Bussang. On en revenait à 50 ans en arrière, du temps de l’oncle Georges Perrin qui faisait faire son camionnage jusque Epinal ou Mulhouse.
Et toi, que deviens-tu ? Tu vas me dire comment tu as retrouvé ton groupe, avec quels éléments il a été refait, si tu en es content, si tu as des nouvelles des jeunes officiers avec toi à Bordeaux, du commandant Tribout. Fouille bien dans ta tête en te disant que tout m’intéresse.
Gravures du Petit Journal - Supplément illustré - 21/04/1918 (N° 1426)
Quelques grands chefs
1. Général Pétain, commandant en chef des armées du nord et du nord-est
2. Général Foch, commandant en chef des armées réunies de la France et de l’Angleterre
3. Maréchal Douglas Haig, commandant en chef des armées britanniques
4. Général Fayolle
5. Général Pershing, commandant en chef des armées américaines
6. Général Currie, commandant en chef des forces canadiennes
7. Général Rawlinson, commandant la 5e armée britannique
8. Général Debenay
9. Général Julian Byng, commandant la 3e armée britannique
10. Général Humbert
Thèmes qui pourraient être développés
- Le général Foch commandant en chef des armées alliées en France
- Autriche - La démission du comte Czernin - Ne pouvant s’expliquer, le Tchèque renégat se retire - Le baron Burian succède au comte Czernin
- Procès - Bolo a été fusillé à Vincennes
- Angleterre - Important changement ministériel en Angleterre - Lord Milner ministre de la Guerre - Lord Derby ambassadeur à Paris
- Mgr Luçon à l'Académie française - Mgr Baudrillart retire sa candidature
- Paris - L'alimentation de Paris - Un office central des viandes
- Arts et culture - Louise de Gustave Charpentier en matinée
- Transport par bœufs de marchandises
- Les gotha G : Famille de bombardiers biplans allemands durant la Première Guerre mondiale
- Quelques grands chefs : Pétain, Foch, Douglas Haig, Fayolle, Pershing, Currie, Rawlinson, Debenay, Julian Bing et Humbert (LPJ Sup)
- Les théâtres de la guerre (LPJ Sup)
- Conseils pratiques - Les rides (LPJ Sup)
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