110e semaine de guerre - Lundi 4 septembre au dimanche 10 septembre 1916
LUNDI 4 SEPTEMBRE 1916 - SAINTE ROSALIE - 764e jour de la guerre
MARDI 5 SEPTEMBRE 1916 - SAINT LAURENT JUSTINIEN - 765e jour de la guerre
MERCREDI 6 SEPTEMBRE 1916 - SAINT ZACHARIE - 766e jour de la guerre
JEUDI 7 SEPTEMBRE 1916 - SAINTE REINE - 767e jour de la guerre
VENDREDI 8 SEPTEMBRE 1916 - NATIVITE DE LA SAINTE VIERGE - 768e jour de la guerre
SAMEDI 9 SEPTEMBRE 1916 - SAINT GORGONIUS - 769e jour de la guerre
DIMANCHE 10 SEPTEMBRE 1916 - SAINT NICOLAS DE TOLENTIN - 770e jour de la guerre
Revue de presse
- Grands succès au nord de la Somme - Nos troupes, dans un magnifique élan, ont enlevé toutes les positions sur un front de 6 kilomètres
- Treize zeppelins sur l'Angleterre - Un des dirigeables abattu près de Londres
- Succès russe à la frontière hongroise
- Des troupes allemandes attaquent la Roumanie
- La conquête de l'Afrique orientale allemande
- Les pertes austro-allemandes sur le front russe doivent dépasser 900,000 hommes
- L'efficacité du blocus britannique
- Nouvelles positions conquises sur les deux rives de la Somme - Total général des prisonniers : 7,000
- Les succès russes continuent
- L'Italie prépare une nouvelle offensive
- Victoire russe en Galicie - 4,500 prisonniers dont 2,000 Allemands
- Le retour possible de M. Venizélos
- Les Trade-unions repoussent la reprise des relations avec les socialistes allemands
- Région de Verdun : nous maintenons nos gains au Vaux-Chapitre
- Intense activité d'artillerie sur le front de la Somme
- Nouveaux échecs allemands sur le front de Verdun
- Le 15e avion de Guynemer
- Plusieurs attaques repoussées par les Italiens
- Nos troupes ont remporté un brillant succès devant Verdun
- Succès roumains en Transylvanie
- Nouveaux succès russes dans les Carpathes
- Le secret de la Bourse en Allemagne
Morceaux choisis de la correspondance
J’espère que tu t’entendras bien avec ton nouveau commandant, quoique juif, et qu’il ne te créera pas d’ennuis.
4 septembre - ELLE.- Je voudrais bien que tu puisses avancer ta permission d’un jour ou deux. Si tu pouvais seulement être ici lundi au lieu de mercredi, j’aimerais beaucoup mieux cela, nous aurions ainsi une bonne semaine.
J’espère que tu t’entendras bien avec ton nouveau commandant, quoique juif, et qu’il ne te créera pas d’ennuis.
Nous avons eu Thérèse et ses petits hier à déjeuner comme d’habitude. J’ai emmené André et Noëlle aux vêpres avec Françoise, qui a voulu nous accompagner et qui a d’ailleurs été très sage.
Ensuite, nous avons pris le thé en en offrant à nos officiers, qui rentraient de manœuvre et qui avaient très chaud. Ils sont comme tous les jeunes officiers, n’aimant pas beaucoup les grands chefs, et sont heureux quand ils savent qu’il leur a été donné un bon petit poil par un supérieur. Par contre le capitaine a puni aussi huit hommes, qui s’étaient indûment fait porter malades pour ne pas assister à la manœuvre.
Maître Robert aurait bien aussi besoin de prison pour devenir sage, les remontrances ne font aucun effet, il n’y a que les coups de règle.
Je pense que tu auras trois belles brisques pour revenir, mais j’ai déjà vu qu’on regrettait de les avoir faites trop voyantes et qu’on allait les établir en laine.
Hier après le thé nous sommes allées, Maman, Thérèse et moi à Rambervillers faire une visite à Mme Maurice Vélin. Maman avait demandé à son mari des boîtes de carton ondulé pour envoyer des œufs à Georges et naturellement il n’a pas voulu les faire payer. Maman voulait donc lui faire une visite de remerciements. Nous y avons trouvé Lucette Boucher et ses quatre bons enfants. Elle partait aujourd’hui pour rejoindre son mari et passer quelques jours avec lui, c’est bien agréable d’être si près l’un de l’autre et pouvoir ainsi se faire des petites visites en attendant les permissions. Elie Vélin était aussi en permission, il a la croix de guerre. Son frère François est au Thillot, faisant partie des automobilistes des Vosges. Il avait été réformé et c’est de son plein gré qu’il a redemandé du service dans les autos. Nous sommes rentrées à toute vitesse craignant la nuit. Aujourd’hui, temps affreux dont on est vite las.
Le nouveau commandant est arrivé hier. J’ai déjà pu voir que c’est un homme très intelligent et un véritable chef.
4 septembre - LUI.- J’ai reçu aujourd’hui ta bonne lettre du 1er et hier celle que m’avait écrite Dédé à qui j’ai répondu ce matin.
Le nouveau commandant est arrivé hier. Tu penses bien ma Mie qu’on est obligé de suivre un peu l’ancienneté et d’ailleurs tu sais que je n’y tiens pas du tout, mais ce commandant est plus ancien que moi, il a été à Charleroi, a fait la bataille de la Marne et est allé à Verdun où il a gagné la croix de guerre. De plus j’ai déjà pu voir que c’est un homme très intelligent et un véritable chef. Sans doute nous regrettons notre brave commandant mais, au point de vue intellectuel et militaire, surtout au point de vue tactique, il n’y a aucune comparaison. Donc tout est pour le mieux si ma petite femme n’est pas trop ambitieuse et je suis persuadé qu’au fond cela lui est bien égal et qu’elle songe beaucoup plus à la permission qu’à tout cela.
De demain en huit, mardi 12, je file rapido et j’arrive le 13 à Epinal où tu seras la toute bonne de venir me chercher en auto, à condition toutefois qu’il ne fasse pas un temps épouvantable comme aujourd’hui.
J’ai reçu des Héritiers une convocation pour le 18 septembre à Epinal. Si tu veux bien m’y conduire, je serai enchanté d’y aller. D’ailleurs nous en recauserons. J’écris à Paul pour Demangevelle car je serai seulement arrivé et je préférerai rester tout simplement à Docelles. Tu sais que j’espère avoir huit jours pour la croix de guerre. Il n’y a jamais de règle uniforme, tantôt on donne huit, tantôt six jours.
Ne sois pas non plus trop ambitieuse pour nos enfants. Ne demandons pas de génie. Félicitons-nous d’avoir des enfants comme nous les avons.
J’ai toujours c’est vrai mes petites idées follettes, mais que veux-tu Mimi c’est que je t’aime bien et que tu es, tu le sais bien, la seule femme qui me les donne. Merci de ta gentillesse, je me réjouis de te revoir toute et je t’embrasse avec les chéris de tout cœur. Ton Geogi.
4 septembre - JMO 5e RAC/Groupe 95.- Le chef d’escadron Bickart est nommé au commandement du groupe.
5 septembre - ELLE.- Nous avons fait une bonne course hier dans les bois avec Maman, les enfants et Camesson, celui qui nous fait de la pâte de bois et qui nous conduisait pour montrer à Maman un lot de forêt qu’il lui conseille d’acheter. Mais c’est dans un gros massif et il n’a pas su trouver le bon chemin. Nous avons circulé pendant deux heures sans succès et finalement sommes revenus sans avoir trouvé, car Maman commençait à se fatiguer. Les enfants étaient contents, on a goûté dans le bois, on a trouvé beaucoup de champignons et il est probable que nous allons y retourner aujourd’hui. Mais nous avons eu un ennui. J’avais laissé l’auto près d’une ferme à la lisière du bois, car c’était près de Deycimont, nous n’avions pas voulu faire les
Nous avons eu hier Thérèse et Marie Krantz pour dîner et bridger. Marie Krantz est rappelée à Nancy à son hôpital et part aujourd’hui.
Paul, qui m’avait annoncé sa visite pour aujourd’hui, est venu me voir lundi pendant que j’étais à Nancy. Je lui ai annoncé ton arrivée vers le 10 en le priant de rester dans les Vosges pendant ta permission pour que tu puisses le voir. Il m’écrit aujourd’hui qu’il part à Paris pour 4 jours et sera de retour dimanche. Nous pourrons donc le voir, il dit qu’il a beaucoup de choses à te dire. Sa femme a eu une nouvelle crise, elle est au lit depuis dix jours, m’écrit-elle.
J’ai reçu une autre lettre de l’Abbé Hamant. Pour lui, il n’y a pas de solution idéale en ce qui concerne l’éducation des enfants ; celle de l’institutrice a ses inconvénients : c’est très ennuyeux d’introduire une étrangère dans son intérieur ; mais elle a aussi ses avantages, car, comme j’ai trois enfants qui sont tous, à divers degrés, à l’âge où l’on commence à étudier, cela me soulagera. Il me donne quelques indications que son expérience lui a suggérées. « D’abord ne vous préoccupez pas encore des langues étrangères. Ce que les enfants dépensent de peine et les parents de soucis et… d’argent pour les langues vivantes pendant les années d’enfance est purement du temps perdu. Cela les embrouille, leur met de la confusion dans la mémoire et l’esprit. Votre petit garçon a largement le temps de commencer cela en 6e, et s’il s’est jusqu’alors bien fortifié l’esprit, vous verrez qu’il rattrapera facilement les autres. Il ne faut donc pas que votre institutrice soit trop savante ; cela vous évitera de la trouver trop exigeante. De même pour les arts d’agrément. Il faut rechercher et solliciter le goût des enfants, et non pas l’imposer. Car toute étude contrainte, surtout à cet âge, est du temps perdu. Cependant il est extrêmement rare qu’on ne découvre pas, dans leur façon même de s’amuser, le germe d’un goût à cultiver. Tantôt l’enfant chante bien et aime à dessiner. Tout cela est à relever et à suivre. Enfin les doléances que j’ai déjà entendues d’une foule d’institutrices se ramènent presque toujours à ceci : elles ne savent jamais à quel moment de la journée elles auront le droit d’être un peu à elles-mêmes et de pouvoir respirer librement. D’autre part le frottement continuel avec les enfants userait vite l’autorité si vous n’accordiez pas un répit régulier et déterminé d’avance, pour éviter des récriminations ».
6 septembre - ELLE.- Je te joins la lettre reçue à l’instant de Marie Molard et d’après ses bons renseignements, j’écris à cette demoiselle pour l’engager, puisqu’ils concordent avec l’idée que j’en avais par sa correspondance. Nous voilà donc décidés à entrer dans cette voie. J’avais encore cherché, je crois te l’avoir dit, à l’éviter, ayant appris que nous avions ici comme chef de poste G.V.C. un instituteur qui aurait pu, pensais-je, donner des leçons à Dédé le matin. Mais, après avoir demandé le temps de la réflexion, il m’a répondu qu’il n’avait vraiment pas le temps. On avait étudié aussi le projet d’envoyer André à l’école à Cheniménil, quitte à mettre Mr Defer en fureur. Mais il paraît que l’instituteur, quoique très bon, se trouve lui aussi surchargé et de plus cela l’aurait mis mal avec son confrère. Nous faisons donc l’essai et puis nous verrons. Pour le moment André se débrouille bien au point de vue physique, il n’a plus peur de monter sur les arbres, sur le portique, il va à cheval sur les chevaux des soldats. On tâchera que l’institutrice ne soit pas toujours sur leur dos, soit au travail, soit en récréation pour leur laisser la faculté d’être eux-mêmes, de développer leur petite personnalité.
La réunion des Héritiers est reportée au 23, c’est ennuyeux, tu n’y seras pas. Il faudra que tu dises bien exactement à Paul ce que tu voudras qu’il répète de ta part. Il paraît que les affaires ne sont plus aussi bonnes que pendant ce premier semestre, la vente devient plus difficile quoique le coton monte encore, le fil commence à baisser. Que sera-ce quand nous aurons tous les Alsaciens avec nous. Enfin, nous ne serons toujours pas parmi les plus malheureux, n’est-ce pas chéri ?
J’avais invité Marie Molard à venir ici pendant la permission d’Adrien, mais ils préfèrent s’installer à Fontainebleau. Ils loueront une auto pour pouvoir circuler dans les environs.
Ne le fais pas trop travailler. Qu’il prenne une bonne provision de santé avant d’aller au collège pour que, lorsqu’il aura vingt ans, il puisse alors travailler hardiment.
6 septembre - LUI.- Je reçois ta bonne lettre du 2. Moi aussi je trouve le temps bien long, mais demandons seulement que d’ici sept jours les permissions ne soient pas supprimées, que je puisse prendre mon train le 12 au matin et arriver le 13 à Docelles, c’est tout ce que je demande maintenant. Bien entendu, si je n’étais pas à Epinal le 13 au matin, ne t’inquiète pas. Tout est calme dans notre secteur et c’est tout simplement que les permissions auront été supprimées pour quelques jours. Mais encore une fois je compte bien que pareille éventualité ne se produira pas et que mercredi prochain je pourrai serrer ma petite mie dans mes bras et lui redire combien je l’aime.
J’ai en effet reçu une convocation des Héritiers et c’est bien tombé en effet, tu pourras m’y conduire. Je ne vois pas pourquoi Pierre pose à l’ordre du jour la question des appointements et tantièmes des gérants mobilisés. Tu sais que pour moi c’est une question réglée et tu es certainement de mon avis, puisque nous avons toujours et sur tout la même façon de voir.
Au sujet de l’institutrice, j’espère toutefois que tu ne renonceras pas à tes droits de mère de famille et que l’institutrice que tu choisiras n’exigera pas, comme certaines paraît-il, qu’on lui laisse absolument le champ libre. Il faut bien mettre les points sur les i à l’avance. Je serais désolé que nos enfants soient tout le temps sous sa coupe et, je le répète, il faut absolument qu’ils aient eux aussi leurs heures de liberté, qu’ils puissent avoir de petits camarades et que l’institutrice n’ait rien à y voir. Tant mieux que notre Dédé ait des idées simples. Il sera plus heureux plus tard mais cependant il te paraissait autrefois plutôt avoir des tendances aristocratiques. Tu vois que les enfants changent vite à son âge. Tant mieux aussi qu’il aille bien. Ne le fais pas trop travailler. Qu’il prenne une bonne provision de santé avant d’aller au collège pour que, lorsqu’il aura vingt ans, il puisse alors travailler hardiment. D’ailleurs ma Mi nous causerons de tout cela dans quelques jours et tu verras que comme toujours, avec un peu de conciliation de part et d’autre, nous finirons par avoir les mêmes idées.
Ma petite mie, je t’embrasse avec les chéris en attendant avec impatience le jour où je pourrai le faire réellement.
7 septembre - ELLE.- Nous rentrons d’Epinal où j’ai conduit Dédé chez le dentiste. Il se laisse très bien traiter, il est vrai que Monsieur Gercet est tellement doux qu’il faudrait être bien gémissant pour trouver qu’on a mal. Avant le rendez-vous nous avons fait les courses habituelles dans les banques, chercher de l’argent, faire quelques achats. Je suis allée voir Paul, que je n’avais pas vu depuis deux mois. Il m’a dit que sa femme allait mieux, elle peut se promener et pour élargir le cercle des promenades elle a acheté un cheval et une voiture caoutchoutée à un marchand d’Annecy, ce qui lui permet de se transporter aux environs de St-Gervais. A part cela, Paul ne m’a pas dit grand-chose. Il avait l’air plutôt sombre, était dégoûté, las de la guerre, il voudrait que ce soit fini. Et puis, je crois que j’ai fait une gaffe, je lui ai demandé s’il n’avait pas de nouvelles d’Henry et de ses projets de vente. Il ignorait la chose. Henry ne lui avait rien écrit. Je crois qu’il a été vexé de voir que Henry t’avait écrit avant de lui en parler. Tu as raison de dire que le silence est d’or, j’aurais bien mieux fait de me taire. Paul est d’avis de vendre la propriété à tout prix, car Henry va certainement s’en occuper de moins en moins, si ce n’est s’en détacher tout à fait en venant habiter Tunis maintenant que Mère n’est plus là et qu’il peut agir librement.
Pierre Mangin a loué, paraît-il, un appartement à Paris qu’il va meubler, c’est donc une installation définitive. Avant de savoir cela, j’avais pensé lui écrire que tu ne serais plus là pour le 23 et qu’il avance la date de la réunion pour que tu puisses y assister. Mais ensuite j’ai pensé qu’il soulèverait peut-être la question d’habitation de la gérance. En ce moment on ne peut s’opposer à ce qu’il habite Paris, puisqu’il est mobilisé ou fait semblant de l’être, mais je trouve qu’il vaut mieux ne pas discuter cela maintenant pour garder notre liberté plus tard. Si on avait l’air d’acquiescer aujourd’hui, après la guerre il pourrait dire : « Vous trouviez cela bon, il y a un an, pourquoi plus maintenant ? » De sorte que je n’ai rien écrit.
8 septembre - ELLE.- Voilà probablement la dernière lettre que je t’écris puisque tu quittes ta batterie mardi. Je suis joliment contente que tu aies huit jours et j’admire pour une fois ton art d’avoir su les obtenir. Les autres fois tu étais toujours si rigoriste et ne voulais pas prendre une minute de plus que tes six jours. Aujourd’hui, c’est régulier et j’en suis ravie.
Le commandant a prévenu Marie Krantz qu’il y aurait un défilé demain matin près d’Arches et nous y conduirons les enfants qui n’ont jamais vu de revue et que cela intéressera. Il fait beau, ce sera joli, on est en vacances, il faut en profiter.
Je t’attendrai à la gare d’Epinal mercredi matin avec joie. Tu sais que je ne crains pas la pluie et le vent et surtout pour aller au-devant de mon chéri, que je me réjouis tant de revoir.
Nous allons tous très bien. Maman qui ne prend qu’un repos bien petit va néanmoins un peu mieux, elle n’a plus de douleurs et n’a plus qu’un peu de fatigue. J’espère qu’à la longue tout ira bien, quand elle n’aura plus tant à faire.
Monsieur Robert a passé tout son après-midi avec des galopins et ce n’est qu’à 5 heures que j’ai pu le retrouver. Il s’était sauvé dès après le dîner, sans chapeau, en tablier. Cette vie au grand air, si elle n’a pas un excellent résultat au point de vue éducation, est très bonne pour la santé. Robert a maintenant très bonne mine et n’était sa température parfois encore un peu élevée on le croirait vraiment guéri. J’en suis bien contente. Tu vas pouvoir en juger.
8 septembre - LUI.- J’ai reçu une bonne lettre hier et aujourd’hui deux autres. Cela c’est très bien ma Mie et tu te doutes bien que je les lis toutes avec grand plaisir. Je ne puis absolument pas venir lundi et je le regrette mais il y a une règle dont on ne s’écarte jamais, c’est qu’il n’y a jamais plus d’un officier en permission dans le groupe. Il faut donc que j’attende le retour de mon prédécesseur pour partir. Tu vois que j’ai tiré le plus possible sur la corde car il ne doit rentrer que mardi soir et moi j’ai obtenu l’autorisation de partir mardi matin pour être à Docelles dans la matinée de mercredi.
Je ne t’écrirai plus ma bonne chérie avant mon retour puisque mes lettres ne t’arriveraient plus. Je réfléchis que je pourrais peut-être encore t’écrire un mot samedi, tu le recevrais mardi, mais, comme j’espère qu’il n’y aura pas de changement, ce ne sera guère la peine puisque tu me verras le lendemain.
Tu comprends, ma petite Mi, tout mon bonheur de te revoir et combien je voudrais en avoir fini avec ces quatre jours qui vont me paraître un siècle. J’espère bien que nous ne passerons pas notre temps mercredi matin à faire des courses à Epinal et que tu t’arrangeras pour les faire avant l’arrivée du train. Je t’avertis que je ne pourrai pas être correct même à Epinal. Ce sera bien plus commode de nous embrasser dans l’auto. Tu n’auras qu’à ne pas aller si vite pour éviter les imprudences. Enfin je suis follement heureux à la pensée de te revoir et je me réjouis aussi tant de revoir nos bons enfants. Embrasse-les bien pour moi. Je te serre dans mes bras comme je t’aime. Ton Geogi.
9 septembre - Isidore Voinson (Armées) à Georges Cuny, son patron.- Depuis longtemps je ne vous ai donné de mes nouvelles. J’ai été passer une huitaine chez nous dernièrement comme permission. Tout va bien, mon gros Robert grandit, mais ne veut pas me connaître. J’ai été occupé par Mr Géhin au Bâs, car Pauline n’avait pas d’ouvrage pour moi, vu qu’elles sont deux pour le jardin. Je relevais de la houille, ce qui m’a mis en train pour l’ouvrage que nous faisons à présent. Je vous dirais qu’il y a quinze jours que nous sommes au camp de Mailly pour faire une route sortant du camp pour aller à Troyes. Me voilà passé cantonnier, ce qu’on en fait des métiers dans cette guerre. Nous partons aujourd’hui cette fois pour nous reformer en section et après direction inconnue : Maroc ou Salonique.
9 septembre - JMO 5e RAC/Groupe 95.- Le lieutenant Machiels venant du dépôt est classé à la 44e batterie.
Gravures du Petit Journal - Supplément illustré - 10/09/1916 (N° 1342)
Nos « as » - Le sous-lieutenant aviateur Guynemer
Le sous-lieutenant aviateur Georges Guynemer dont nous donnons aujourd’hui le portrait n’a qu’un peu plus de vingt et un ans. Voilà, certes, un jeune Français chez lequel la valeur n’a pas attendu le nombre des années. C’est que l’âme du jeune aviateur est une âme bien née, une âme profondément française. Le sous-lieutenant Guynemer a de qui tenir. Son arrière-grand-père, qui servait il y a cent ans en Espagne sous les ordres du général Hugo, fut décoré de la Légion d’honneur, à vingt-deux ans, pour sa belle conduite au combat de la Bidassoa. Le père de Georges Guynemer est capitaine en retraite.
Le jeune homme, quand la guerre éclata, préparait l’examen de Polytechnique. Il voulut tout aussitôt s’engager. Mais, grand et maigre, il n’avait pas le poids correspondant à sa taille. Le conseil de révision le refusa à quatre reprises. Heureusement, un officier ami de sa famille parvint à le faire accueillir dans l’aviation. Entré à l’école d’aéronautique de Pau en octobre 1914, il reçut son premier brevet au bout de trois mois et son brevet supérieur au Bourget en avril 1915. Dès le mois suivant, il était sur le front. Et, depuis lors, que d’actions d’éclat n’a-t-il pas accomplies !
Guynemer se classe à la tête des grands abatteurs d’avions allemands. Il se distingue par ces qualités bien françaises : le courage poussé jusqu’à la témérité, l’esprit de décision, l’énergie, le sang-froid, par ces qualités qui font dire aux boches quand ils parlent de nos aviateurs : « Ah ! si nous avions de tels hommes ! »
Fidélité - « Mirza », la chienne des tranchées, qui ne voulait pas abandonner la tombe de son maître
Mirza, la petite chienne du front, a donné aux hommes une belle leçon de fidélité et d’amour. Son maître était soldat sous Verdun. Elle l’avait suivi de la ville à la bataille. Elle ne voulait point se séparer de lui. L’obus ne suffisait point à l’effrayer. Elle était la chienne du soldat Cuny, et où allait le soldat Cuny, Mirza se rendait sans crainte. Une balle passa. L’homme tomba. Il était mort. On l’enterra. Mirza, dès lors, sut son nouveau devoir. Sur la tombe, elle resta. Elle y serait restée longtemps encore, toujours peut-être, si l’un des camarades du poilu défunt ne l’avait de force emmenée à Paris, en venant en permission, pour la confier à de braves gens. Mirza ne mérite-t-elle pas d’être admirée par le plus grand nombre ? Mais, pour Dieu, qu’on ne permette pas à cette affectueuse petite bête de prendre l’air sur le pas de la porte, en son nouveau logis. Sans nul doute, elle connaîtrait le lasso de fil de fer, la voiture de la mort et la fin qui guette tant de chiens de la grande ville sur la table de vivisection.
Les instantanés de la guerre (photos)
Lance-bombes à air comprimé
La descente de la saucisse
Avion donné à la Serbie par la France
"Tipperary" le chien des poilus se fait photographier avec son masque
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Versant sud de la "304" et ravin de la Hayette
Périscope pouvant s'élever à 25 mètres de haut pris aux Allemands
Un camping
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La mitrailleuse des Indiens
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