14-18Hebdo

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Carnets de guerre (Anna Vautrin) – N° 79 – 23 au 30 octobre 1916

Document transmis par Renaud Seynave, son arrière-petit-fils - 18/10/2016

 

1910 Vautrin Alexis et Anna Coll Michel Segond.jpg

Alexis et Anna Vautrin à Nancy en 1910

 

Lundi 23 octobre 1916

Nous recevons plusieurs lettres de Paul qui est au combat dans la Somme. Les Français ont fait une attaque et son bataillon vient de prendre Sailly-Saillisel près de Péronne au-delà de Combles. Il nous écrit « Cela marche bien mais quel bombardement de part et d’autre ! Les boches ont laissé quelques abris solides que notre artillerie n’a pas démolis. J’habite un trou à 6 mètres sous terre sous la route nationale de Bapaume à Péronne. Mon bataillon a pris ce matin deux mitrailleuses et trente Bavarois mais j’ai une mitrailleuse qui a été démolie par l’artillerie ennemie. On ne peut faire aucun mouvement de jour et nous vivons au milieu du paysage le plus désolé qu’on puisse rêver. Nous pensons être relevés avant peu. Mes hommes sont fatigués mais vraiment bien courageux et gais au milieu des pires dangers ! ».

 

Mardi 24 octobre 1916

Autre carte reçue de Paul aujourd’hui. « Je suis en bonne santé malgré un temps épouvantable qui rend notre séjour dans la boue peu charmant. Voilà 8 jours que nous ne nous sommes pas lavés ni mangés chaud ».

 

Nous tremblons pour lui car les combats sont très acharnés sur la Somme. Suzanne est toujours à Gérardmer avec ses enfants.

 

Mercredi 25 octobre 1916

Paul nous écrit « Je suis dans un trou profond attendant l’heure pour sauter sur le boche d’en face, attente plutôt énervante quoique je devrais y être habitué. J’ai confiance et j’espère que cela ira bien ». Il est toujours en pleine attaque.

 

Jeudi 26 octobre 1916

Paul écrit « Voilà trois jours que j’habite mon trou de 2 mètres sur 1.50 mètres à 6 mètres de profondeur, trou laissé par les boches qui s’il n’est pas confortable met à l’abri des obus fort nombreux. On se repose le jour et on circule la nuit avec prudence car la route est balayée par des rafales de mitrailleuses et pleine de cadavres. Le ravitaillement arrive essoufflé la nuit. Je vis seul avec mon ordonnance et deux chasseurs. Les journées sont longues et on respire mal. Il y a 17 marches à descendre, si raides qu’il faut descendre à reculons et à quatre pattes ! Cela fait de la gymnastique. »

 

Nous sommes bien anxieux de le sentir ainsi exposé. Que Dieu le garde ! Jusqu’ici il a une bonne étoile. Rien de nouveau à Nancy.

 

Vendredi 27 octobre 1916

Paul écrit de la Somme. « Encore une sale journée passée sans mal malgré un terrible bombardement qui n’arrête pas une seconde, nuit et jour. Nous avons à peu près atteint nos objectifs. Le capitaine Friquet est blessé assez grièvement. J’espère que nous ne tarderons pas à être relevés car c’est très dur, on ne peut bouger de jour mais je n’ai nulle crainte et suis très bien abrité. Je fais un tour la nuit aux tranchées. Il faut se coucher à terre à chaque fusée éclairante. »

 

Samedi 28 octobre 1916

Heureusement, nous venons de recevoir un mot de Paul nous disant qu’ils viennent d’être relevés des tranchées et qu’ils sont en troisième ligne. C’est encore dangereux car c’est souvent là qu’on reçoit le plus d’obus mais enfin ils ne marchent plus à l’assaut et ils vont sans doute être remis en arrière ces jours ci. Tant mieux car cela calme un peu notre inquiétude.

    

N79 JMO Octobre 1916.jpg

Journal de marches et opérations du 68e BCA en octobre 1916 avec une carte de Sailly

(Archives du ministère de la Guerre).

 

Dimanche 29 octobre 1916

Nous avons en ce moment une escadrille anglaise d’aviateurs de bombardiers. Ils sont au parc d’aviation de Malzéville. Ils sont partis hier jeter des bombes sur Hagondange. On rencontre beaucoup de ces aviateurs anglais dans les rues de Nancy.



21/10/2016
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