Carnets de guerre (Anna Vautrin) – N° 76 – 2 au 8 octobre 1916
Document transmis par Renaud Seynave, son arrière-petit-fils - 27/09/2016
Alexis Vautrin, professeur de clinique chirurgicale de l’université de Nancy (rangée du bas, au centre).
Lundi 2 octobre 1916
Je rencontre Madame Droit qui me donne des nouvelles de ses parents qui sont à Kaysersberg chez les Allemands. Ils écrivent tous les 15 jours par la Suisse et ils commencent à souffrir du manque de vivres.
Mardi 3 octobre 1916
Nancy est calme et on n’entend presque pas le canon. Dans les maisons, on voit les fenêtres avec du papier coupé et entrecroisé pour éviter qu’elles se brisent en cas de bombardement. Le verre coûte très cher et rare. Il y a eu tant de vitres cassées qu’on ne trouve plus facilement de verre à acheter.
Mercredi 4 octobre 1916
Il y a un nouvel avis très sévère qui prescrit qu’on ne doit voir aucune lumière aux fenêtres sans persiennes. Tous les cafés de la ville doivent avoir des stores et leurs lampes doivent être voilées. Les becs de gaz en ville ne sont plus allumés. Nancy est tout à fait sombre. Le soir, on ne peut plus se diriger qu’avec de petites lampes de poches. Les quelques becs de gaz qui sont allumés ont le verre barbouillé de bleu. Les autos ne doivent plus avoir de phares allumés, elles n’ont plus que des petites lanternes. L’ordre est très sévère. C’est à cause des avions allemands pour qu’ils ne puissent pas repérer la ville.
Jeudi 5 octobre 1916
Des dragons sont passés avec des lances cours Léopold. Où vont-ils se battre ?
Tout un régiment de soldat est passé aussi, il y avait des nègres et beaucoup de coloniaux.
Les soldats ont des fanions sur lesquels il y a un croissant et une main de Fatima. Ils vont dans la Somme ou à Verdun ! Pauvres gens, combien en reviendra-t-il ?
Il y a des mulets et des mitrailleuses avec eux. C’est le 3e tirailleur.
Ils jouent une musique nègre en passant cours Léopold. Il y a dix cuisines roulantes qui fument en marchant.
Vendredi 6 octobre 1916
Nous entendons dans la nuit plusieurs avions au dessus de Nancy. Ils partent en reconnaissance pour bombarder Metz. Ils sont lumineux dans la nuit. On dirait de grosses étoiles filantes.
Samedi 7 octobre 1916
Suzanne part à Gérardmer avec ses enfants pour rester un peu avec sa belle-mère jusqu’à la Toussaint.
Dimanche 8 octobre 1916
On fait aujourd’hui les obsèques d’un aviateur qui est mort dans son aéroplane au moment où il défendait Nancy contre les taubes. Il a reçu une balle et son copilote l’a ramené mort à Malzéville au parc d’aviation.
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