14-18Hebdo

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Campagne du 106e B.C.P - LE LINGE - (Mars-Septembre 1915) - 3e partie : Repos, reconstitution, et passation de commandement

 

Récit illustré de la campagne du 106e B.C.P au Linge (mars-septembre 1915) ; un ancien chasseur du bataillon témoigne, en compagnie de l'arrière-petit-fils de son commandant.

Patrick Germain - 05/10/2015

 

T39-3 Image1.jpgLe chasseur HENRY poursuit et achève son récit…

 

 « Après ses terribles saignées, le Bataillon panse ses plaies et se reconstitue, à l’aide de re – complètements d’effectifs provenant des dépôts.

 

Le 10 août, notre commandant, ainsi que 7 autres bénéficiaires, reçoit la Croix de guerre avec palme des mains du général de MAUD’HUY, au cours d’une prise d’armes à Corcieux :

 

T39-3 Image2.jpgLe général de Maud’Huy et derrière lui, le commandant Chenèble

 

T39-3 Image3.jpgLa revue du bataillon

 

T39-3 Image4.jpgLe général de Maud’Huy décore le commandant Chenèble de la Croix de guerre avec palme

 

Le 106e se voit confier la garde du drapeau des chasseurs le 21 août. Le drapeau des chasseurs est unique pour tous les bataillons de chasseurs, car la réunion de ceux-ci constitue Le corps des chasseurs ; c’est un grand honneur pour le bataillon que de fêter cet évènement avec solennité, et il revient au lieutenant le plus âgé, le lieutenant COSTANTINI, de le porter à l’occasion de la manifestation officielle :

 

T39-3 Image5.jpgLe lieutenant COSTANTINI porte le drapeau des chasseurs au 106e B.C.P le 21 août 1915

 

T39-3 Image6.jpgLe défilé avec le drapeau des chasseurs

 

T39-3 Image7.jpgLe drapeau des chasseurs

 

Et puis le bataillon, comme il l’avait fait avant Le Linge, circule à nouveau dans diverses localités, où il est accueilli avec enthousiasme ; à Rambervillers, où il séjourne à partir du 27 août au Quartier Richard, notre commandant raconte l’agréable vie de garnison qu’il y a passée pendant quelques années au 17e B.C.P, où il dirigeait la compagnie de commandement ; ce bataillon était commandé à l’époque par le commandant SERRET, à présent général, qui commande la 66e D.I « L’Alsacienne », dont l’état-major est à Wesserling ; notre commandant nous dit qu’il continue à entretenir des relations amicales avec lui, mais il ne sait pas encore qu’il sera, dans quelques mois, amené à commander la 6e brigade de chasseurs alpins de cette division, à la mort du général à l’Hartmannswillerkopf, début janvier 1916…

 

C’est à Rambervillers que notre commandant apprit qu’il était nommé au grade de lieutenant-colonel.

 

Et c’est à Rambervillers encore qu’une recrue de qualité vint rejoindre nos rangs, en la personne de l’abbé HECKER, vicaire à Rambervillers. Cet excellent prêtre, dégagé de toute obligation militaire, nous accompagnera en qualité d’aumônier volontaire comme chasseur de 2e classe, à la section hors-rangs. Il sera tué en 1917 par un éclat d’obus allemand, en célébrant sa Messe. Il avait obtenu la Croix de guerre à Verdun.

 

T39-3 Image8.jpgL’abbé Hecker (aumônier du bataillon)

entouré du commandant Chenèble et du médecin-major Baillet du 106e B.C.P

 

Puis ce sera le tour de Gerbéviller d’accueillir le bataillon le 6 septembre :

 

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Cette localité martyre avait fait l’objet, fin août et début septembre 14, des pires atrocités de la part des Allemands ; incendies, pillages, exécutions de civils ; une équipe de religieuses héroïques, conduite par Sœur Julie, leur a tenu tête avec un extraordinaire courage ; après avoir sauvé la vie d’un millier de blessés accueillis dans leur hospice, elles ont évité l’embrasement de l’édifice. Ces 6 religieuses ont été citées à l’ordre de l’armée et quelque temps après, Sœur Julie fut décorée de la Légion d’honneur pour services exceptionnels par le Président de la République.

 

Aussi notre commandant lui fit-il rendre les honneurs par le bataillon.

 

T39-3 Image10.jpgSœur Julie entourée des officiers du 106e B.C.P

 

A Damelevières, le 7 septembre, le 106 organisa un concours de pêche à la truite (car notre commandant était un très fin pêcheur), à l’occasion de La fête du bataillon :

 

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La fête du 106e B.C.P

 

Peu de temps après, notre commandant nous annonça que, muté comme chef de corps au 223e R.I, il allait devoir nous quitter, remplacé par le commandant BURTSCHELL. Ce jour là il tint à ce qu’une photo de tous les officiers du bataillon soit réalisée, et il la dédicaça à chacun d’entre eux :

 

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Les officiers du 106e bataillon entourant leur commandant

 

Mais avant son départ devait avoir lieu la cérémonie de remise de la Croix de guerre avec palme au fanion du bataillon ; elle eut lieu 17 septembre 1915 et fut présidée par le général GERARD, qui décora le fanion en commentant la citation correspondante, félicitant le bataillon pour sa conduite et formant tous ses espoirs dans la victoire finale des troupes alliées.

 

Et quelle ne fut pas notre heureuse surprise de contempler plus tard la belle photo prise lors de cette prise d’armes, en première page du journal « Le Miroir », en date du 12 mars 1916 :

 

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« Le Miroir » du 12 mars 1916 – La décoration du fanion du 106e B.C.P (Croix de guerre avec palme)

(le lieutenant-colonel CHENÈBLE est le 1er à gauche)

 

Notre Commandant nous quitta définitivement le 25 septembre, cérémonie qui eut lieu à Saint-Nicolas-de-Port, devant sa somptueuse basilique où notre aumônier l’abbé HECKER célébra une messe à la mémoire de tous nos chers camarades disparus.

 

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Portrait du lieutenant-colonel CHENÈBLE

 

Me voici enfin parvenu au terme de ce voyage dans le passé,  et j’ai là, devant moi encore sur cette photo, ce fanion… puisse-t-il être toujours soigneusement conservé comme une relique ; Madame CLAUDE m’avait glissé à ce sujet, lorsque je le lui rapportai, qu’elle le confierait à son petit-fils Patrick après sa mort. Aussi j’espère qu’il en prendra soin, au moment où j’aurai rejoint là-haut ma famille, tous mes chers camarades chasseurs, mon vénéré commandant, et puis aussi tous ceux d’en face…

 

Car je me souviens à présent de ce qu’un de mes capitaines, vieux baroudeur, m’avait avoué un jour après la guerre :

« Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout ».

 

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Le fanion du 106e B.C.P aujourd’hui

 

Chasseur Pierre HENRY (posthume)

Avec la collaboration de Patrick GERMAIN

 

Sources :

Archives familiales

Le J.M.O (Journal de marche et des opérations) du 106e B.C.P

Le site du 106e B.C.P ( auquel j’ai contribué)

« Le Drame du Linge » (Armand Durlewanger 1970) : croquis du Linge et photos champ de bataille

A suivre…



09/10/2015
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