14-18Hebdo

Patrick Germain - 1er mai 2015

Avant-propos

A la lecture de l’épisode paru la semaine passée, vous avez pu effectuer un survol économique et social des principaux évènements ayant jalonné l’itinéraire forcé qu’ont suivi, chacun dans leur propre rôle, les personnages des familles d’industriels. Les correspondances échangées entre eux constituent donc les incidences familiales de ces évènements.

C’est ainsi que s’y trouvent tracés, au jour le jour, les itinéraires incertains de la fluctuation des prix, de la disponibilité des matières premières, et bien sûr du destin tragique de la population ouvrière, largement amputée de sa main d’œuvre masculine ; on apprend tour à tour la mort au combat d’un soigneur de continus, d’un tisserand, d’un monteur de chaînes, d’un contremaître, avec toutes les terribles conséquences familiales et sociales qui en découlent…

Je me suis beaucoup intéressé à ce thème « industriel » des correspondances, où il s’y trouve abondamment développé, car il évoque pour moi une tradition familiale textile vosgienne, et la 1^ère étape de mon parcours professionnel, en qualité de cogérant des Tissages Germain Frères à Ventron. Aussi ai-je pensé qu’il serait intéressant et opportun de traiter, en complémentarité de l’aspect « patronal » du fonctionnement des usines textiles à cette époque (traité la semaine passée), la composante parallèle du « personnel ouvrier » ; mais encore fallait-il disposer d’éléments aussi précis et circonstanciés pour dresser un tableau de ce qu’était la condition ouvrière au début du XXème siècle, et comment elle a vécu ces 52 mois de guerre.

Je me suis alors souvenu d’un ouvrage paru il y a exactement 30 ans, dénommé « La mémoire de Clara, tisserande »[1], dans lequel figurent toutes les réponses. Il se trouve que cet ouvrage me touche de très près, car, s’appuyant sur la vie des paysans-ouvriers de la commune du Ménil-Thillot, les scènes de travail qui y sont décrites se déroulent précisément dans un tissage que mon entreprise a exploité de 1975 à fin 1986 dans cette commune. La parution de ce livre, en 1985, coïncide donc avec la période durant laquelle nous étions propriétaires de cette usine, qui apparaît d’ailleurs en photo sur la couverture du livre.

J’ai donc décidé de tirer parti de ce hasard, ou plutôt de ce signe du destin, en vous faisant profiter des pages de ce livre qui se rapportent à la période de 1910 à 1920.

Bien entendu, s’agissant de la reproduction pure et simple du texte et des illustrations correspondantes, j’ai préalablement contacté la famille de l’auteur, ainsi que l’éditeur, pour leur développer mon projet et ainsi solliciter leur autorisation. J’y ai rencontré un accueil très favorable, d’autant plus que ce livre étant à présent épuisé, mes interlocuteurs ont trouvé dans cette initiative une occasion intéressante de faire renaître cet ouvrage dont le contenu suscite respect et émotion.

Cet exposé se décline en 6 parties réparties sur la présente semaine et les 4 semaines à venir :

1^ère partie : Avant-propos et présentation illustrée de l’environnement industriel de Clara.

2^ème partie : La condition ouvrière en 1910.

3^ème partie : Les années d’apprentissage ; un tissage au début du XXème siècle.

4^ème partie : Les salaires, le pouvoir d’achat, le coût de la vie, les soins, la vie domestique, les bals, les mariages.

5^ème partie : La guerre.

6^ème partie : La fin de la guerre ; la grève.

L’environnement industriel de Clara

Le Tissage de Clara il y a 100 ans quand elle y travaillait

Clara Veançon à 18 ans

Le Tissage de Clara en 1985, exploité à cette période par les Tissages Germain Frères de Ventron

(photo de couverture du livre)

A suivre…