14-18Hebdo

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Henry Novel – Lettres à ses parents (1914-1918) - 3- Mai 1917

 

Henry Novel, 17 ans en 1914, est mobilisé en 1916 à Chambéry puis rejoint le front en 1917. Futur étudiant en médecine il est affecté à des services d’ambulance. Il correspond régulièrement avec ses parents qui habitent Grenoble où son père exerce la profession d’avoué.

Document transmis par Michel Novel, son fils - 19/10/2015

 

Ce 5 mai 1917 (tampon de la poste pour le mois et l'année)

Mes chers Parents,

 

Je viens à l'instant de recevoir deux lettres une de Maman et l'autre de Papa contenant des subsides qui arrivent bien à point. Quoique j'ai en effet peu de dépenses, la presque totalité de mon argent était resté soit à Lyon soit en voyage et ici on a toujours quelques petites dépenses qui ont absorbé le reste. Je vois avec plaisir que vous commencez à recevoir mes lettres et j'espère que maintenant la poste vous apportera régulièrement de mes nouvelles. Nous venons de passer deux jours très réussis hier, 64 obus de 280 sur l'ambulance ! On a embarqué en toute hâte les blessés transportables dans des trains qui sont partis en oubliant leurs vitres sur les quais !!!! Cette nuit un feu d'artifice énorme, fantastique, coupé par les explosions formidables des bombes d'aéros. C'est très, très curieux et depuis quatre ou cinq jours j'ai l'impression d'être à la guerre pour de bon mais c'est très peu dangereux, on a simplement l'impression d'un gaspillage de poudre étonnant.

 

On a attaqué ce matin devant nous et il court des bruits très favorables, entre autre la batterie qui nous tirait dessus aurait été démolie, de cette façon nous resterions ici car hier il était fortement question de tout laisser en plan ! Je vous raconterai tout cela à ma permission mais quand sera-t-elle maintenant !! A part ces petits événements qui coupent la monotonie de l'existence ici, rien de neuf. Une chaleur torride, des blessés qui arrivent en assez grande quantité (toujours cette attaque) et c'est tout.

 

Amitiés à tous et peut être à bientôt.

 

Ce mercredi (23/05/1917 ?) (Tampon de la poste 24 05.1917)

En-tête : Brasserie Métropole - 18 boulevard Montmartre - Paris

Mes chers Parents,

 

Je n'aurais jamais cru qu'il fut si difficile de sortir de Paris une fois que l'on y est entré. Je suis arrivé ce matin juste à temps pour manquer l'unique train de permissionnaires qui part à 9h30 de la gare du Nord. Quand aux trains civils de la gare de l'Est impossible d'y pénétrer, cela me procure donc l'avantage de passer vingt-quatre heures à Paris. J'en profite pour me perdre dans le dédale des tramways et autobus, je me retrouverai toujours à temps. Pour comble de bonheur, il fait un temps magnifique et pas trop chaud.

 

Je termine ma carte pour reprendre le cours de mes pérégrinations, en ce moment je suis à la recherche de la tour Eiffel et de Notre Dame et j'espère que mes recherches seront couronnées de succès.

 

Je vous enverrai de mes nouvelles dés que je serai arrivé à destination en attendant, je vous embrasse tous bien affectueusement.

 

Ce mercredi (23/05/1917 ?) Paris

Je sors, de l'hôpital de Breton et j'ai trouvé ce pauvre Michel dans un bien mauvais état. Il est maigre, pâle et a à peine la force de parler. Je ne suis resté que cinq minutes avec lui pour ne pas le fatiguer. Ses blessures n'étaient pas très graves mais son mauvais état résulte plutôt du surmenage d'avant sa blessure.

 

J'espère bientôt trouver mon régiment, le bureau de renseignements de la gare de l'est - toujours bien renseigné - m'ayant indiqué que je le trouverais à l'endroit d'où je suis parti... ce qui m'étonnerait fort !!!

 

J'ai eu le plaisir (?) de voyager hier avec le jeune Achard qui montre vraiment un esprit très combatif joint à un militarisme fort désagréable.

 

Je vous embrasse tous.

 

Ce 25 (tampon de la poste : 26.5.1917)

Mes chers Parents,

 

Enfin arrivé à destination après un voyage impossible par Crépy-en-Valois, etc. !!! Ici pas mal de travail et pour comble de bonheur les boches marmitent sans grands dégâts d'ailleurs. J'ai trouvé ici mes patins qui du reste ne sont pas et n'ont jamais été les miens, comme je ne peux pas les mettre je vous serais très reconnaissants de bien vouloir m'envoyer les miens car j'en ai sûrement une paire à la maison. Je vous renverrai ceux-là dès que j'aurai le temps. Je voudrais les avoir le plus tôt possible car ils me rendraient bien service. Je ne vous écris pas plus longuement aujourd'hui car je suis assez fatigué de mon voyage d'hier.

 

Je vous embrasse tous.

 

Ce dimanche (27/05 ?) 1917 (tampon de la poste pour l'année)

Mes chers Parents,

 

Rien de bien neuf ici depuis mon retour. Il fait très beau, très chaud, les boches nous donnent toujours pas mal de travail et nous en ont même donné à domicile la nuit dernière, un infirmier blessé et deux anciens blessés "revus et considérablement augmentés" comme disent les livres. Je crois néanmoins que la région a des tendances à redevenir calme car on expédie des troupes d'ici pour…

 

Celui de mes camarades qui était assez malade au moment de mon départ a été évacué sur Boulogne où il va mieux, parait-il. On a pu heureusement lui conserver son bras et j'espère qu'il s'en tirera.

 

J'ai reçu hier une lettre de Mme Boiteux qui me dit avoir fait porter à la maison une photo de Xavier. Vous me la mettrez, je vous prie, de côté pour des temps encore lointains. J'ai également reçu une carte d'Albert et j'attends l'adresse de Georges pour lui envoyer un mot.

 

Je crois que le régime des restrictions de l'intérieur commence à nous arriver ; on diminue encore la ration de viande fraîche et on remplace en grande partie le pain par du biscuit. Par contre par suite du départ des troupes on commence à trouver un peu de tout ici du beurre et des œufs (œufs 3frs. la douzaine et beurre 8frs. le Kg.), les prix sont même je crois pas exagérés.

 

Je termine ma lettre car il n'y a pas mal de travail assez pressé et je vous embrasse tous bien affectueusement.

 

P.S. Les colis postaux mettent 15 à 20 jours pour arriver.

 

Ce 31 mai 1917 (tampon de la poste pour l'année)

Mes chers Parents,

 

Le temps qui avait l'air de vouloir se rafraichir s'est remis au beau et nous souffrons de plus en plus de la chaleur et des moustiques. Par contre moins de travail ; la région redevient calme. J'ai reçu une carte de Georges qui pense repartir pour l'Alsace et une lettre de Maman qui m'apprend l'arrivée d'une nouvelle cousine, les patins autrefois envoyés ne m'allaient pas pour la bonne raison qu'ils sont à Georges et ne m'ont jamais appartenu. Quant au colis par chemin de fer annoncé par cette lettre, le beurre va arriver à l'état de liquide gras et les légumes feront je crois un engrais excellent car il faut compter 20 jours de voyage et avec cette chaleur !!!!

 

Je vous embrasse tous bien affectueusement.

A suivre…



08/01/2016
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