14-18Hebdo

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Edouard Favre - Mes cahiers de souvenirs - 8 - Mai 1915

 

Edouard Favre, 38 ans en 1914, officier d’active dans l’artillerie, va passer toute la guerre au front. Il tient un journal, et nous suivons ses préoccupations dans 3 domaines : la guerre, sa famille, et son « idée fixe » : les avions suspendus...

Document transmis par Marie Favre, sa petite-fille - 11/11/2014

 

1915 Favre Edouard BEST rogne Photoshop.jpgEdouard Favre - 1915

     

2 mai (1915)

Le Lieutenant-colonel me retourne ma réponse au Ministre et il parle même de huit jours d’arrêt, c’est de plus en plus drôle. Il trouve, et aussi le Chef d’escadron, que mes expressions ne sont pas suffisamment mesurées. Je remplace, pour leur faire plaisir, « avait bien voulu » par « avait eu le loisir, et « sérieuse et le discuter » par « plus approfondie ». Cela ne change pas grand-chose.

 

3 mai (1915)

Promenade ce matin avec ma batterie, mais très réduite. D’abord j’avais un canon au lieu de quatre, l’un étant en réparation, les deux autres à la peinture, ils avaient été remplacés par des caissons. Et puis j’ai laissé en route tous mes servants pour travailler à je ne sais quelle ligne téléphonique du groupe.

 

7 mai (1915)

Il a fallu encore modifier mes « observations respectueuses ». On m’a reproché de les avoir écrites sur la lettre elle-même, et puis d’autres termes ont paru trop sévères. Finalement j’ai dû adresser une simple note d’une excessive politesse. Il est vrai qu’il n’y a jamais d’excessive politesse, même à l’égard de gens qui vous ont traité poliment d’imbécile trois fois de suite, puisqu’ils l’ont fait poliment.

 

Je suis vraiment très étonné de mon calme après ce jugement qui paraît avoir tous les caractères du définitif, alors qu’il y a quelques mois cela me rendait malade et m’empêchait de dormir. Cela me vexe de voir négliger quelque chose qui me paraît très important, comme cela me vexerait si c’était un de mes amis qui le proposait.

 

11 mai (1915)

On parle d’un succès que nous aurions eu près d’Arras, de la réprobation universelle soulevée par le torpillage du Lusitania. Il faut que les Allemands soient bien exaspérés par le blocus de la mer pour en arriver à de semblables procédés de guerre.

 

22 mai (1915)

Dix jours sans écrire un mot ici, je n’ai cependant pas fait grand-chose depuis ce temps et les loisirs ne m’ont pas manqué mais, poursuivi par mon idée fixe, j’ai vu tout à coup des contradictions, des incertitudes, des obscurités et j’ai voulu reprendre mes raisonnements dès leur point initial. Ces longues réflexions, la tête dans les mains et fumant des cigarettes, ne sont pas restées tout à fait infructueuses.

 

24 mai 1915

Paul[1] est blessé et prisonnier à Paderborn, il a pu donner de ses nouvelles à l’oncle Jacques et cela l’a tiré de l’affreuse inquiétude qu’il avait depuis un mois qu’il n’avait rien reçu de lui. Aucun détail sur sa blessure, il demande argent et vêtements. Son écriture est normale, il a été évacué très loin du front, il ne doit donc pas être très gravement atteint. C’est triste tout de même.

 

L’Italie est en état de guerre avec l’Autriche depuis ce matin. Le ministre de la Guerre vient de transmettre cette nouvelle à toutes les troupes françaises, cela produit une bonne impression. Pourvu qu’ils ne se fassent pas battre à plate couture !

A suivre…



[1] Paul Callies (1889-1975), cousin, fils de Jacques Callies et Marie, née Aussedat



01/05/2015
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