14-18Hebdo

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Edouard Favre - Mes cahiers de souvenirs (1914-1918) - 1/22 - Décembre 1914

Document transmis par Marie Favre, sa petite-fille - 11/11/2014[1]

 

A la déclaration de guerre, Edouard Favre approche de ses 38 ans. Il est officier d’active, capitaine d’artillerie. Le 6 août 1914, il part de Grenoble pour les Vosges et l’Alsace. Il commande la 3ème batterie du 1er groupe du 2e régiment d’artillerie.

  

Il est veuf, sa femme, Marie Aussedat, a attrapé la diphtérie en soignant son fils Bernard et est morte en 1912, âgée de 33 ans. Il a 5 enfants : François, 11 ans, Jean, 10 ans, Thérèse, 8 ans et demi, Marguerite, dite Goty, 7 ans et Bernard, 3 ans et demi. Sa mère Louise, née Callies, a pris en charge ses enfants. Tous l’appellent mère Zi.

  

Edouard Favre va passer toute la guerre au front. Mais il a une théorie révolutionnaire concernant l’aviation, qui en est encore à ses débuts, il s’agit d’avions suspendus, et il veut la faire partager. Il est obstiné, il frappe à toutes les portes et il ne comprend pas pourquoi personne ne semble s’y intéresser. En tout cas ses travaux lui ont été « une intéressante distraction » et lui ont probablement permis d’occuper son esprit pendant ces quatre années douloureuses et interminables.

 

1915 Favre Edouard BEST rogne Photoshop.jpgLe capitaine Edouard Favre en 1915 (il a 39 ans)

  

1912 famille Edouard Favre ROGNE.jpg
Famille Edouard Favre vers 1912 : Jean, François, Thérèse, Bernard et Goty
« Le Louvre » à la main (Archives Alain Aussedat)
 

 

Framerville - 28 décembre 1914

Chaque fois que j’aperçois un avion français ou allemand je ne puis m’empêcher de songer aux théories que j’ai émises l’année dernière et qui m’ont préoccupé pendant de si longs mois. Il me semble voir l’air qu’ils traversent défoncé par ces ailes rigides et je m’imagine ces mêmes appareils transformés suivant ma conception et évoluant avec aisance, bondissant dans l’espace, faisant demi-tour avec la facilité que nous constatons chez les oiseaux.

 

Au moment où a commencé la guerre j’étais en pourparlers avec le jeune de Montgolfier pour tenter avec lui des essais. Depuis longtemps j’y avais songé, mais j’avais pensé me faire comprendre par les membres de la Section technique de l’Aéronautique. Ils m’ont fait attendre six mois une réponse absurde montrant clairement qu’ils n’avaient rien compris. J’ai cherché à donner des explications complémentaires, je n’ai pas mieux réussi, et ils m’ont délivré solennellement vers le 20 juillet une confirmation de leur absurde verdict. Ces longs pourparlers m’ont empêché de commencer pour mon compte les essais auxquels j’étais décidé. J’avais essayé aussi de me faire entendre de Blériot et de Lioré qui dirige la maison Morane-Saulnier. Ces beaux messieurs m’ont lu ou entendu distraitement et n’y ont rien compris non plus. Bref, je suis parti pour l’Alsace repoussé par tous ceux qui semblaient qualifiés pour me comprendre et n’ayant pu, retardé par toutes ces démarches et empêché par mon service, m’occuper d’une réalisation pratique.

 

J’avais cependant dès 1913 (mai et juin) construit deux modèles, le premier abandonné avant son achèvement, le second emporté, monté à St Jorioz. Ce modèle était destiné à des essais de vol plané sans moteur. La brièveté de ma permission, un temps défavorable, un outillage trop rudimentaire m’empêchèrent de poursuivre des essais en 1913.

 

Depuis cinq mois nous sommes en guerre et je pense à chaque instant à l’appoint formidable que seraient pour nous des aéroplanes comme je les conçois. C’est dans ce but que j’ai envoyé mon mémoire à l’Académie des sciences, sollicitant par l’intermédiaire de Monsieur Termier[2] une étude aussi prompte que possible. Mais il en est de cette haute assemblée comme de tant d’autres administrations, le papier est classé et ne revoit le jour que lorsque vient son tour. Lorsque ce tour viendra la guerre sera peut-être terminée.

 

Désespérant de ce côté j’ai écrit au général Baquet, puis sur son conseil au colonel Estienne. Le premier m’a répondu qu’il n’y entendait rien et le second qu’il n’avait pas le temps de s’occuper d’études longues et décevantes. J’ai demandé alors, récemment et officiellement, d’être entendu par un membre de la Section technique, et l’on m’a répondu par la même voie qu’il n’y avait rien à faire maintenant. Le chef du S.A. du G.Q.G. écrivait « La Direction de l’Aviation s’est arrêtée à un certain nombre de types d’avions qui donnent entière satisfaction. Les circonstances actuelles ne permettent pas de faire des expériences et de changer quoi que ce soit aux types adoptés ». Je n’ai pu m’empêcher de répondre par la lettre suivante à ce général :

 

« La réponse que vous avez cru devoir faire à ma demande d’un simple entretien avec un membre de la Section technique de l’Aéronautique m’est parvenue hier. Je l’avais espérée différente.

« Que les appareils actuels vous donnent entière satisfaction, je le conçois sans peine si vous les comparez à ceux du passé. Mais ils sont loin de la perfection et vous paraîtront bien primitifs avant peu d’années.

« Que les circonstances actuelles ne se prêtent pas à des expériences, cela est évident, mais si huit jours d’essais avec une personne compétente devaient démontrer la valeur de la modification proposée et que 48 heures de travail sur chaque appareil en permit la transformation, vous seriez le premier à les prescrire.

« La suspension élastique est une nécessité mécanique plus impérieuse pour les avions que pour les automobiles. Parce qu’il l’a négligée l’homme a dû attendre pour voler la découverte du moteur léger.

« Veuillez agréer… »

 

Je doute que cette démarche ait beaucoup plus de succès que les précédentes. Que faire alors ?

 

J’ai bien écrit récemment au directeur du Laboratoire aérodynamique de la Tour Eiffel pour lui demander s’il pourrait faire quelques expériences : à quoi cela peut-il nous conduire ?

 

Et pourtant je suis dans la vérité, tous les aviateurs et les membres éminents de la Section technique sont dans l’erreur et montrent une formidable inertie pour en sortir. Loin de diminuer ma conviction, cette longue attente n’a fait que la fortifier et la mûrir. Toute cette théorie qui est la mienne se tient debout. Elle est simple et elle explique tant de choses restées jusqu’ici dans le vague ou dans l’inconnu : l’incohérence apparente de la résistance de l’air, sa variation avec l’inclinaison de la surface, la stabilité des cerfs-volants, le vol facile des oiseaux et si dispendieux pour nos appareils, la vibration de l’aile du goéland, le vol balancé de la mouette, le mouvement elliptique de l’aile de l’oiseau, le mouvement en ¥ de la libellule… Elle explique tout cela simplement, ce qu’aucune théorie n’avait pu faire jusqu’ici. Elle parait être vraie puisqu’elle explique ce qui restait incompréhensible. Vraie, elle paraît si facile à réaliser et, si elle est réalisée, ne donnera-t-elle pas les résultats attendus ?

 

Les avions suspendus seront stables, économiques, leur rayon d’action augmentera, ils pourront sortir par tous vents ou peu s’en faut, s’élèveront avec la plus grande facilité, emporteront un poids utile plus considérable, évolueront avec une aisance, une souplesse dont seuls les oiseaux peuvent nous donner une idée.

On pourra construire des appareils puissants, lourds, rapides, ce qui ne se peut faire maintenant. La variation de vitesse pourra s’obtenir sans doute au moyen du basculement latéral des éléments de surface…

 

Tout cela n’est peut-être que de l’imagination. Mais il serait intéressant cependant de savoir la part de vérité qui s’y trouve et il ne me semble pas être très près de pouvoir l’apprendre. Et cela m’attriste. Tristesse que j’attribue évidemment un peu à mon amour-propre froissé de l’indifférence empreinte d’une certaine pitié que me marquent ceux auxquels je parle de ces questions. Tristesse aussi de voir négliger par l’armée un outil incomparable de combat, devant lequel cesseraient d’exister l’avion allemand, le Zeppelin allemand et qui rendrait plus facile la victoire définitive de la France.

 

J’aurais aimé que les « St Jorioz » (ce sera leur nom) fissent leur sensationnelle apparition pendant cette guerre, c’est pourquoi j’ai voulu insister, supplier… Serait-ce en vain ?... Au risque de passer pour un poseur, un illuminé, un imbécile peut-être ? Il est vrai que je suis bien osé, n’étant pas aviateur, d’émettre une opinion quelconque sur le sujet réservé de l’aviation. Il est vrai aussi que tant de choses ineptes sont publiées sur ce sujet, figurant même en bonne place dans certaines revues réputées, que les ingénieurs aviateurs sont excusables de mettre mon travail dans le même panier. Mais enfin, ayant insisté comme je l’ai fait, je m’étonne néanmoins qu’ils n’aient pas réussi à me comprendre. J’avais cru être clair, mais certains calculs sont considérés par des esprits nonchalants comme des raisonnements obscurs, surtout lorsqu’ils comportent des infiniment petits et des intégrales. Il n’est pas étonnant que ceux auxquels sont soumis ces calculs, qui n’ont pas le courage de les suivre et ne peuvent se compromettre en l’avouant, cherchent à se sortir de cette difficulté par une lettre de félicitations qui doit évidemment à leur avis satisfaire très largement l’auteur. Mais l’auteur grincheux en insistant lourdement les met dans une cruelle alternative : ou avouer leur paresse ou leur ignorance, ou confirmer pour un temps plus ou moins long leur primitif et absurde jugement. Cette seconde solution a paru la plus sûre.

Il est inutile de marquer de l’animosité contre ces idoines. D’abord leur conduite est certainement excusable par le travail considérable qu’ils ont sans doute à fournir, et l’exposition très confuse que j’ai faite de mes idées au début ne leur a sans doute pas permis d’en retirer l’idée principale et directrice. Il est vrai que mes lettres l’ont assez mise en évidence mais passons… Je m’attarde trop à cette simple question d’amour-propre.

 

Amour-propre, oui, et il est bien permis d’en avoir un peu, mais aussi regret très sincère de voir négliger une force au moment où toutes les forces disponibles doivent être dirigées contre l’ennemi.

 

29 décembre (1914)

Pour avoir écrit ces pages, avoir mis au point la situation actuelle, me voilà plus calme : c’est d’ailleurs tout à fait artificiel. J’attends pour le moment le résultat très problématique d’une lettre. Quand le résultat sera connu, que cette nouvelle tentative aura échoué, je serai sans doute repris par la même impatience maladive de trouver un autre moyen d’aboutir.

 

L’Académie des sciences interviendra-t-elle en temps utile ? C’est douteux, il lui faut plus de temps pour émettre un avis sûr, consacrant la valeur d’une œuvre. J’ai bien demandé, c’est une grande indiscrétion, à Monsieur Termier si je pouvais avoir une appréciation officieuse. Ma lettre qui date du commencement de décembre est restée sans réponse jusqu’ici. Mr T. aura sans doute avec sa bonté coutumière écrit à son collègue de l’Institut.

 

Le directeur du Laboratoire de la Tour Eiffel pourra-t-il accepter de faire en mon lieu et place des expériences, et ces expériences seront-elles assez concluantes pour convaincre tous ceux qui me refusent tout crédit ?

 

Enfin, j’entrevois une autre solution. Celle-là consisterait à passer dans le service de l’Aviation. M’y accepterait-on en temps de guerre alors qu’on me l’a refusé en temps de paix à cause de mes enfants ? Peut-être, et une fois dans le cénacle, je pourrais peut-être faire entendre ma voix et prêcher la vérité.

 

Il en est une autre encore à laquelle s’arrête bêtement mon imagination échauffée. Depuis deux mois chaque fois que l’occasion s’en présente j’ouvre le feu avec ma batterie sur les aéroplanes ennemis. Jusqu’ici les résultats ont été nuls. Il faut l’attribuer au manque d’éducation de mes artilleurs à ce genre de tir auquel ils ne peuvent être exercés qu’en temps de guerre. Mais il faudrait être aveugle pour ne pas constater des progrès très sensibles. Les deux ou trois dernières attaques ont forcé l’aviateur ennemi à faire demi-tour, le tir était suffisamment rapide pour créer en avant de lui un barrage infranchissable. De là à imaginer un succès plus complet, la capture possible d’un avion ennemi, il n’y a qu’un pas facile à franchir. Ensuite je me vois demandant l’autorisation de conserver cet aéroplane et de le transformer suivant mes plans… Ce n’est que du roman.

 

En attendant cette occasion qui viendra ou ne viendra pas, je reste dans ma tranchée de ma cote 91 près de l’une des meules sur laquelle je grimpe pour apercevoir l’ennemi. Cet abri souterrain dont la destination primitive était de m’abriter contre les obus de l’ennemi était au commencement de novembre un inconfortable boyau de 2 mètres de profondeur. Son incommodité, l’absence de tout projectile explosif nous ont amenés à l’élargir et à nous y réfugier lorsque le froid, la neige ou la pluie empêchent de rester dehors. Un fourneau de cuisine trouvé dans le village détruit d’Herleville, un fauteuil, trois chaises, une petite table rendent confortable cette habitation un peu primitive, et la couche de paille qui se trouve au fond permet de s’y livrer aux douceurs du sommeil et de compléter ou de prolonger des nuits écourtées.

 

Assis à cette petite table, éclairé par la lampe à pétrole qui brûle toute la journée dans cet antre obscur, chauffé par le poêle où nous brûlons du bois et du charbon, j’écris ces premières pages de mon journal. Il convenait dans cette période si calme de la guerre de commencer par l’exposé de mon idée fixe, l’idée de guerre passant malgré moi au deuxième rang quand l’occasion de tirer le canon cesse de se présenter. Et cette occasion est rare maintenant, l’ennemi ne songe pas à attaquer, il n’en paraît plus capable, ses contre-attaques ont toutes été repoussées et nous restons maîtres des tranchées que nous lui avons prises récemment. Notre infanterie n’a d’ailleurs pas l’ordre d’attaquer, elle reste immobile dans ses tranchées attendant que, nos coffres enfin garnis et notre ravitaillement en munitions assuré, nous soyons en mesure de lui ouvrir la marche avec des milliers d’obus. Cette heure tant attendue sonnera-t-elle enfin ? L’ordre du généralissime pour une attaque générale sera-t-il bientôt exécuté ? On parle d’une attaque qui aurait eu lieu sur Albert et qui aurait permis de rompre la digue de l’envahisseur ? Que faut-il en croire. Les fausses nouvelles sont si fréquentes, surtout lorsqu’on en attend. Mais comment supposer que cette rupture à Albert ait pu se produire après l’échec de la formidable attaque allemande sur l’Yser et sur Ypres. Ils y avaient mis cependant une force imposante en infanterie et en artillerie. Ces masses sont venues se briser sur les retranchements des Alliés. Pouvons-nous espérer un succès plus facile ? Peut-être notre canon est-il plus propre à assurer la progression de l’infanterie, de la faire précéder par nos obus tombant avec une suffisante précision sur les abris et les tranchées ennemies : notre petit calibre et notre rapidité de tir permettant de mieux répartir un même poids d’obus et dans le même temps que le gros matériel allemand. Peut-être ? Souhaitons qu’il en soit ainsi. L’ennemi ne paraît pas très en force sur notre front. Ses contre-attaques sont assez vives, mais il renonce assez vite. Il a évidemment de sérieuses réserves. Pourront-elles résister à la nouvelle armée que nous avons pu former ?

 

Un petit intermède : mon observateur à Lihu vient de me demander de tirer un coup de canon sur la route de Vermandovillers à Pressoire. La pièce qui est chargée de ce tir a été longue à tirer, mais enfin son obus est venu éclater sur l’arrière d’une petite colonne d’infanterie qui a aussitôt pris le trot pour s’éloigner : l’observateur prétendrait même les avoir entendus crier : ce n’est guère vraisemblable car la colonne en question est à plus de 2 000 m de lui. Il est vrai que l’air est très calme maintenant, tandis qu’il y a une heure le vent du midi soufflait avec violence depuis hier soir avec des rafales de pluie, de neige et de grésil.

 

Nouveau tir sur la route : deux obus. Cette fois le résultat serait meilleur que tout à l’heure, l’ennemi aurait laissé plusieurs des siens sur la route… Et dire que je me réjouis très sincèrement de ce résultat, que je l’annonce triomphalement à la batterie pour exalter son moral. Il faut être en guerre pour éprouver ces sentiments. Il est probable que si je voyais de plus près mon ouvrage et surtout si je connaissais les pauvres diables qui dorment maintenant leur dernier sommeil, j’en serais moins fier.

 

31 décembre 1914

Le Lieutenant-colonel me tient sans doute en haute estime depuis que j’ai combattu ses idées sur le tir contre aéroplanes. Il vient de me demander mon avis personnel sur une méthode de tir qu’on a soumise à son appréciation. Je le lui envoie et il n’est guère favorable.

 

J’y travaillais hier soir quand un brigadier est venu m’annoncer que le sous-lieutenant Guilleminot et le M.d.L. Bosse venaient d’être blessés à Lihu. Je me suis précipité au téléphone pour avoir des nouvelles puis je suis monté à cheval pour aller voir ces pauvres petits. Guilleminot est perdu probablement, il a un éclat d’obus dans la tête. On l’a transporté tout de suite à l’ambulance d’Harbonnières où il a subi cette nuit une trépanation, on n’a pas pu retirer le projectile. Quant au M.d.L. il est assez sérieusement touché : il a une balle dans le côté droit, une blessure au bras gauche et l’épaule gauche traversée.

 

Braves tous deux. Guilleminot n’est à la batterie que depuis trois semaines. Je l’ai vu un jour, revenant de Lihu, s’arrêter sur la route repérée de Framerville à Lihons pour observer d’où partaient les coups qu’on lui destinait. Et avant-hier lorsqu’il est retourné à Lihu prendre son poste d’observateur, ma dernière recommandation a été : surtout soyez prudent, ne vous exposez pas inutilement. Il ne s’est point exposé inutilement, mais il a été touché au moment où il venait de régler un tir et où il allait revenir à un poste d’observation plus sûr.

 

Bosse était à côté de lui, venu pour vérifier la ligne et le poste téléphonique. Le même obus l’a blessé. Dans les Vosges, au col du Hantz, le 24 août, Bosse qui n’était encore que brigadier éclaireur fut chargé de conduire un cheval au colonel Lancrenon qui était encore en Alsace. Le col venait d’être occupé par l’ennemi. Bosse s’engage dans un petit chemin sous bois, aperçoit tout à coup devant lui et marchant dans le même sens que lui deux fantassins allemands. Il n’hésite pas, prend son sabre, charge et passe. Quelques balles le poursuivirent, un tournant le mit à l’abri. Il ne put d’ailleurs rejoindre le Colonel et rentra à la batterie à travers bois sept heures plus tard à 2 heures du matin.

 

J’ai pleuré hier soir en rentrant chez moi. Mon premier sentiment en apprenant ces pertes n’a pas été dicté par le cœur, j’ai songé de suite au remplacement de ces deux précieux soldats. Ce n’est qu’après que cela m’a fait de la peine, du chagrin même. Ils ont à peine vingt ans l’un et l’autre !

 

Edouard Favre - Journal page 122.jpgJournal d’Edouard Favre (1ère page des cahiers de guerre)

A suivre… 2/22 - Janvier 1915


 

[1] Ce document est extrait du livre « Mes cahiers de souvenirs » publié en 2014 à partir du journal que nous a laissé Edouard Favre et qui nous permet de le suivre à travers trois époques : ses vacances à Saint-Jorioz chez ses grands-parents Callies (1899-1900), sa demande en mariage (1901-1902) et la période de la guerre de 14.

[2] Pierre Termier (1859-1930) : Géologue, Polytechnique et Ecole des Mines, membre de l’Académie des sciences ; sa fille, Thérèse (1889-1961), a épousé en 1911 Pierre Callies (1887-1973), un cousin, fils de Jacques et Marie Callies.

 

 

 



26/12/2014
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