14-18Hebdo

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Carnets de guerre (Anna Vautrin) – N° 75 – 25 septembre au 1er octobre 1916

Document transmis par Renaud Seynave, son arrière-petit-fils - 22/09/2016

 

1910 Vautrin Alexis et Anna Coll Michel Segond.jpg

Alexis et Anna Vautrin à Nancy en 1910

 

Lundi 25 septembre 1916

Paul et Suzanne arrivent avec les enfants de Gérardmer car Paul a sa permission. Ils sont restés 3 jours à Gérardmer puis ils passent 3 jours à Nancy.

 

Paul nous dit que la prise de Cléry dans la Somme a été très dure. Ils étaient dans les caves. C’est son bataillon qui a pris le village.

 

L’ordonnance de Paul, un brave garçon de Corcieux dans les Vosges a été enseveli avec un autre soldat qui est mort. Le sous-lieutenant a pu les dégager. Les deux musettes de Paul ont été enfouies ainsi que son manteau de caoutchouc et son appareil photographique. L’ordonnance a fouillé dans la terre et a pu retrouver l’appareil et une musette mais l’autre qui contenait des conserves, son manteau et du linge est restée sous terre.

 

Paul a interrogé des officiers allemands. Ils disent du bien de leur empereur. Ce sont des officiers de la garde prussienne. C’est le prince Eitel, un des six fils de l’empereur Guillaume II, qui les commande. Paul leur dit « Vous ne l’avez jamais vu dans les tranchées » et les officiers répondent fièrement « Non, mais ce n’est pas sa place, vos généraux ne viennent pas non plus dans les tranchées. Nous tomberons probablement mais nous entrainerons tout le monde avec nous ».

 

La prise de Cléry a été très dure. Nous avons fait beaucoup de prisonniers.

 

Le général Sarrail est toujours à Salonique et tient en respect la Grèce et son roi Constantin.

 

Mardi 26 septembre 1916

Les alliés ont défendu à la Grèce toute communication par la poste avec leurs alliés allemands, autrichiens et turcs.

 

Le roi d’Espagne a obtenu de l’Allemagne le retour de 2 000 femmes de Lille et Roubaix qui avait été emmenées en Allemagne.

 

La Russie a dépensé depuis le commencement de la guerre 32 milliards.

 

Mercredi 27 septembre 1916

Les Allemands réquisitionnent tout en Allemagne. La famille impériale allemande commence à donner toute sa vaisselle d’or et ses bijoux.

 

On entend le canon.

 

Jeudi 28 septembre 1916

Albert Vautrin, mon beau-frère, est au Puy pour garder des officiers allemands prisonniers. Il nous écrit qu’il a interrogé des prisonniers polonais qui sont passés à Gercourt, il y a un mois. Ils ont vu la maison de notre pauvre mère qui est encore debout et qui abrite un dépôt de munitions d’obus allemands. Le reste du village est détruit.

 

Vendredi 29 septembre 1916

Nous voyons Marthe Gegout, la nièce d’Alfred Grandjean, qui nous raconte que son fiancé prisonnier en Allemagne a caché une lettre dans une semelle de pantoufle qu’il a envoyée à Madeleine Pagny. Elle ne savait pas pourquoi il lui disait qu’elle devait prendre soin de ses pantoufles. Il disait qu’il était malheureux au camp.

 

Rien de nouveau à Nancy.

 

Samedi 30 septembre 1916

La Roumanie qui est en guerre avec nos ennemis est obligée de reculer après avoir bien avancé. Elle n’a pas les canons nécessaires.

 

Dimanche 1er octobre 1916

On nous annonce la mort de Charles Michel, docteur en droit qui était danseur de mes filles Suzanne et Madeleine. Il était dans un état-major. Il vient d’être tué dans le tunnel de Tavannes près de Verdun qui abritait un dépôt d’obus. Il y a eu plus de 500 morts et tout l’état-major de brigade avec une ambulance divisionnaire.

 

 

L'accident du 4 septembre 1916 du tunnel de Tavannes (Source Wikipédia)

  

Au début de septembre 1916, le tunnel est occupé par l'état major de la 146e brigade d'infanterie, des fantassins du 8e régiment d'infanterie, des 22e, 24e et 98e régiments d'infanterie territoriale et par les formations sanitaires de la 73e division d'infanterie avec des blessés.

 

Le 4 septembre, vers 21 heures 15, une corvée, constituée d'ânes portant des munitions et du ravitaillement, arrive au tunnel du côté de Verdun à l'ouest. Un fardeau porté par un des ânes prit feu pour une raison indéterminée. L'animal se sentant en danger, pénètre dans le tunnel et met le feu aux bidons d'essence du groupe électrogène placés à l'entrée. Sous l'effet d'un violent courant d'air, le feu atteint la réserve de munitions qui explose. L'explosion est ressentie dans toute la région. Les Allemands, par leurs bombardements redoublés, piègent les troupes françaises à l'intérieur du tunnel et bloquent l'arrivée des secours. Malgré tout, la sortie est (côté ennemi), partiellement obstruée, est dégagée par les soldats de la seconde partie du tunnel qui réussissent à s'enfuir.

 

Le tunnel brûle pendant deux jours, le nombre exact de victimes n'a pas pu être déterminé avec précision, une grande partie des corps ayant totalement disparu. On considère que plus de 500 hommes ont trouvé la mort dans l'incendie. Cet accident a été censuré dans la presse, les victimes ont été déclarées « disparues » à leur famille par les autorités militaires. À la suite de l'incendie, le commandement français fait réaliser des travaux de réfection et d'aménagement pour éviter une nouvelle catastrophe.

 

On dit que c’est une grenade qui est tombée et qui a mis le feu au dépôt. Charles Michel était fils unique.

 

Le fils de Monsieur Chaprion de Bar-le-Duc a été tué dans la Somme ainsi que le commandant Salducci que nous connaissions.



23/09/2016
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