14-18Hebdo

Le Président Poincaré et Joffre sont venus à Nancy. Ils ont visité le plateau d’aviation de Malzéville puis ils sont allés à Gérardmer…

Hôtel de l’Altenberg près de La Schlucht en octobre 1915

PC du général de Maud’huy commandant la 7^e armée pendant l’attaque contre le Linge.

(Source photographique : Collections BDIC, album Valois).

Document transmis par Renaud Seynave, son arrière-petit-fils - 28/10/2015

Lundi 8 novembre 1915

Tous les jours nous entendons fortement le canon. Paul nous écrit de l’Hilsenfirst que le général de Maud’huy est changé. C’est le général de Villaret qui commande maintenant l’armée d’Alsace.

L’armée allemande est toujours près de Riga en Russie. J’ai reçu des cartes de prisonniers russes qui sont à Zwickau et sont très malheureux. Les prisonniers russes sont beaucoup plus malheureux que les prisonniers français et anglais. Ils m’ont écrit en russe… Je vais leur envoyer des paquets. J’en envoie tous les 8 jours à 6 prisonniers de la Meuse, de Gercourt et des environs.

Mardi 9 novembre 1915

La monnaie fait toujours défaut. Les sous sont introuvables. On rend toujours la monnaie avec des billets de 50 centimes et de 1 franc. Cela devient difficile. On ne voit plus du tout de pièces d’argent, rien que des billets. A la poste, ne pouvant pas avoir de monnaie, on m’a rendu des timbres.

On n’entend plus le canon aujourd’hui.

Je vois Madame Aerts qui me dit que son père Monsieur Dreux, maitre des forges près de Longwy et qui loge l’état-major allemand dans son château depuis le début de la guerre à Mt-St-Martin vient d’être emmené en otage à Longwy avec Mr de Saintignon parce que les Allemands réclamaient 1 million qu’ils n’ont pas voulu payer. Ils avaient déjà donné un million au commencement de la guerre. Ils sont dans un hôtel à Longwy et ne peuvent sortir qu’une heure par jour. Les ouvriers métallurgistes de M. Dreux à Mt-St-Martin ne veulent plus travailler pour les Allemands. Madame Aerts a reçu un mot de son père mais elle ne sait pas si sa mère est avec lui ou si elle est restée à Mt-St-Martin, quelle inquiétude !

Mercredi 10 novembre 1915

Le canon tonne de nouveau. Il y a eu cinq blessés aux Beaux-arts. On dit que M. Berlet est revenu aveugle d’Allemagne. Sa mère le croyait mort car elle n’avait pas eu de ses nouvelles depuis plus d’un an.

Jeudi 11 novembre 1915

Le Président Poincaré et Joffre sont venus à Nancy. Ils ont visité le plateau d’aviation de Malzéville puis ils sont allés à Gérardmer et de là en Alsace.

La Bulgarie a déclaré la guerre à la Serbie. Elle marche avec l’Allemagne et la Turquie. La pauvre Serbie est bien encerclée et va sans doute être vaincue ayant des forces doubles chez ses ennemis.

M. des Cilleuls qui est secrétaire de la Faculté de médecine vient de renvoyer au tsar des Bulgares Ferdinand Ier la décoration qu’il lui avait envoyée pour le remercier de s’occuper des étudiants bulgares à Nancy, car nous avions beaucoup d’étudiants de médecine bulgares. Il renvoie sa médaille par voie diplomatique, accompagnée d’une lettre déplorant cette alliance « avec des puissances ennemies et barbares ».

Vendredi 12 novembre 1915

Edouard est toujours en Argonne. Il fait office de capitaine.

La neige est tombée sur les montagnes. Il y a eu presque un mètre à La Schlucht. Les automobiles de ravitaillement ont beaucoup de peine à passer.

Samedi 13 novembre 1915

On se demande si la Grèce restera neutre ou si elle ne se tournera pas du côté des Allemands. Comme le Kaiser est le beau-frère du roi de Grèce, il aura sans doute les préférences du roi de Grèce.

Dimanche 14 novembre 1915

Nous assistons aujourd’hui à une séance donnée aux Beaux-arts pour les blessés. Des jeunes gens jouent des comédies et on est heureux de voir le bonheur des blessés riant en entendant les comédies. On a amené les blessés les plus graves sur des brancards.

A suivre…