14-18Hebdo

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Carnets de guerre (Anna Vautrin) – N° 26 - 5 au 11 avril 1915

 

Suzanne écrit de Gérardmer que lors de l’attaque de l’Hartmannswillerkopf […] un soldat est allé lancer le billet dans leur tranchée. Après bien des hésitations, les boches sont sortis sans armes…

Document transmis par Renaud Seynave, son arrière-petit-fils - 30/03/2015

 

1915 Alexis Vautrin avec Yvonne et Marguerite.jpgYvonne, Marguerite et leur père Alexis Vautrin

  

Dimanche 4 avril 1915

Rien de nouveau, on se bat toujours beaucoup dans le Bois Le Prêtre et nous entendons de temps en temps le canon.

Lundi 5 avril 1915

C’était hier Pâques mais une fête de Pâques bien triste !

Mardi 6 avril 1915

J’ai reçu une lettre de Georges Boucher, toujours prisonnier à Osnabrück. Il va bien et jouit d’un régime un peu moins sévère que les autres prisonniers. Comme il sait très bien l’allemand, il est interprète entre ses compagnons et les Allemands. De plus, le duc de Bade qu’il a vu à Douai a écrit au commandant du camp pour le recommander. Il lui a envoyé 200 cigarettes. Avec cette recommandation, on est moins sévère avec lui.

Mercredi 7 avril 1915

Des aviateurs français sont allés jeter des bombes sur l’Alsace. Malheureusement, une bombe est tombée sur la maison de Monsieur Stoffel à Sélestat. Comme sa maison est à côté des casernes, nos aviateurs ont cru qu’elle faisait partie des casernes. C’est ennuyeux d’être bombardé par les Français. Les Allemands de Sélestat étaient heureux de dire que le nid du Français était bombardé.

Jeudi 8 avril 1915

Annette a 4 ans aujourd’hui ! Suzanne est toujours à Gérardmer près de sa belle-mère. On me dit que Madame … est à Strasbourg emprisonnée et qu’on lui a fait subir un interrogatoire car on la traite comme une espionne. Il parait qu’elle a logé un état-major là où elle était pour les vacances quand la guerre s’est déclarée. On a vu qu’elle était innocente. Le canon a tonné très fort aujourd’hui, on se bat toujours beaucoup près de Pont-à-Mousson et près de Moncel.

Vendredi 9 avril 1915

Toujours le canon.

Suzanne écrit de Gérardmer que lors de l’attaque de l’Hartmannswillerkopf, il y avait de l’artillerie lourde. Paul voyait des bras et des jambes dans les airs. Il a même vu un Allemand projeté en l’air et qui est retombé avec son calot sur la tête. Pendant l’attaque, Paul a fait bombarder les tranchées ennemies avec des grenades. Ayant fait cesser le bombardement, il a écrit un billet en allemand « Rendez vous, si dans 20 minutes, vous ne vous êtes pas rendus, je reprends le bombardement ». Un soldat est allé lancer le billet dans leur tranchée. Après bien des hésitations, les boches sont sortis sans armes au fur et à mesure. Paul leur disait de se coucher à plat ventre. Il en est venu 189 que Paul a fait encadrer et qu’il a suivi révolver au poing pour les conduire à son colonel. Parmi eux, il y avait 3 officiers. C’est la compagnie de Paul qui est arrivée la première au sommet. Il avait promis 20 francs à celui de ses hommes qui y serait le premier.

Après ce beau fait d’armes, le régiment a été félicité et le général Serret qui n’avait qu’une médaille militaire à donner est venu la remettre au soldat de Paul qui avait été jusqu’à la tranchée ennemie. En la donnant, il a dit : « Puisque nous n’avons plus de clairon, nous allons faire une salve pour ouvrir le ban et une autre salve pour fermer le ban. » C’était très émouvant. Cette prise de cette hauteur de l’Alsace a été relatée dans tous les journaux. C’est un fait de guerre de grande importance.

(Note de Renaud Seynave : Paul Boucher a reçu une citation : Ordre n°14, 81e Brigade « […] a su par son action et son énergie maintenir en première ligne la compagnie qu’il commandait, malgré les contre-attaques ».)

Samedi 10 avril 1915

Un taube est venu ce matin et a lancé 2 bombes, une sur Malzéville et l’autre près de l’église St-Georges sans faire grand mal. Hier soir, à 10 heures, 4 formidables coups de canon se sont fait entendre. C’était du côté de Moncel. Nous voyons aujourd’hui Adrien Molard qui nous dit qu’un zeppelin a tenté de venir sur Nancy mercredi soir mais qu’il a été repoussé à la frontière.

Dimanche 11 avril 1915

Rien de nouveau aujourd’hui, on n’a pas entendu le canon aujourd’hui.

A suivre…



03/04/2015
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