14-18Hebdo

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76e semaine de guerre - Lundi 10 janvier au dimanche 16 janvier 1916

 

LUNDI 10 JANVIER 1916 - SAINT MARCIEN - 526e jour de la guerre

MARDI 11 JANVIER 1916 - SAINT HYGIN - 527e jour de la guerre

MERCREDI 12 JANVIER 1916 - SAINT ARCADE - 528e jour de la guerre

JEUDI 13 JANVIER 1916 - BAPTEME DE N.-S. - OCTAVE DE L’EPIPHANIE - 529e jour de la guerre

VENDREDI 14 JANVIER 1916 - SAINT HILAIRE - 530e jour de la guerre

SAMEDI 15 JANVIER 1916 - SAINT PAUL - 531e jour de la guerre

DIMANCHE 16 JANVIER 1916 - SAINT MARCEL - 532e jour de la guerre

  

Revue de presse

-       La presqu'ile de Gallipoli évacuée par les troupes franco-anglaises

-       Les Monténégrins évacuent Berana - Ils reprennent et reperdent Touriak - Sur le mont Lovcen, ils perdent les positions de Kouk et de Rstatz

-       Important succès des Anglais en Mésopotamie

-       Les Serbes à Corfou

-       L'état du Kaiser se serait aggravé

-       La conscription votée par 431 voix contre 39 à la Chambre des communes

 

 

75e sem Image1 EDP 11-01-1916.pngL'Echo de Paris 10/01/1916

 

Morceaux choisis de la correspondance

12 janvier - ELLE.- Je t’ai suivi en pensée au cours de ton long voyage, je ne dis pas toute cette nuit car, à ma grande honte, je dois avouer que j’ai bien dormi. Le soleil est venu me saluer dès le matin et j’ai regretté ton départ car, pour la première fois depuis ta venue, tu aurais pu te promener agréablement. Nous allons tous bien. Je pensais aller cet après-midi chez le docteur à Remiremont et il vient de m’écrire qu’il est nommé à Paris et me l’annonce depuis la gare d’Epinal. Il me prie aimablement de lui écrire ce que je deviens, etc. Mais de loin c’est toujours difficile de donner des conseils. Enfin, il m’a dit que je me repose, c’est ce que je vais faire. Bonnes tendresses, mon chéri. Ta Mi.

 

C’est dur de se réhabituer à la solitude et au veuvage après les heures heureuses passées avec toi.

13 janvier - ELLE.- C’est dur de se réhabituer à la solitude et au veuvage après les heures heureuses passées avec toi, mon chéri. Il faut bien pourtant garder son courage, pour ne pas enlever à son mari celui qu’il est obligé de montrer à tout son entourage et dans des cas autrement pénibles que ceux qui peuvent survenir ici.

 

Tu as dû reprendre le commandement de ta batterie maintenant. Ecris-moi bien vite demain. Je serai contente de savoir que ton voyage s’est bien passé et que tu n’as pas eu d’ennuis, à Nancy par le bombardement, ou à Paris par suite de retard des trains ou de changement dans tes projets.

 

André, malgré les bourrasques, joue aux soldats avec ses chers gamins, Noëlle fait ses devoirs et Bertus est au fumoir en train de faire des constructions. Il chantonne sans trop savoir, je crois, ce qu’il fait et ce qu’il chante, je le regarde par la porte vitrée et cela m’amuse de l’entendre.

 

Le monteur de câble ne peut venir à Cheniménil, il est malade. Thérèse en a de suite prévenu Paul. Nous attendons aussi toujours la transmission de la calandre. N’as-tu pas oublié la lettre à déposer à la gare d’Epinal, c’était justement pour demander l’autorisation d’expédition à la commission du réseau. J’ai continué nos petits calculs[1] qui m’intéressent fort. Je ne veux pas te dire jusqu’à quelle heure j’ai veillé l’autre soir pour les faire, car tu me gronderais. Désormais je les ferai l’après-midi pendant que je me repose. Une fois au courant d’ailleurs, cela ne me demandera pas longtemps.

 

J’ai constaté avec plaisir ce matin que nous avions grossi Robert et moi : Robert 200 gr. en un mois et moi 150 gr. Il y a donc du mieux dans notre état et, avec la petite cure que j’entreprends, il faut espérer que cela continuera et que je retrouverai mes forces d’antan.

 

14 janvier - LUI.- J’ai fait bon retour avant-hier et suis arrivé ici vers 9 heures. L’automobile d’un de mes camarades se trouvait à la gare de Villers-Cotterêts et m’a épargné l’ennui de coucher à l’hôtel et de revenir à cheval le lendemain.

 

J’ai dîné chez les Molard, qui vont bien et ont été très intéressés des nouvelles que je leur ai données de Docelles. Puis Marie m’a accompagné chez Reutlinger[2], j’étais d’ailleurs passé chez le coiffeur d’abord, et je pense que je serai réussi. D’ailleurs la douzaine coûte 90 francs[3] et Marie me disait que pendant la guerre le prix est diminué de moitié. S’il est vrai qu’on n’en a jamais que pour son argent, ton Geogi va être superbe. Tu sauras que j’ai réglé à l’avance ma douzaine, c’est l’habitude de la maison. Tout cela nous a demandé un certain temps et je ne fus libre qu’à trois heures moins le quart. Vite un saut chez Pathé et de là à la gare du Nord où j’ai pris à quatre heures mon train pour Villers-Cotterêts, où j’arrivai un peu avant huit heures.

 

Rien de changé ici sauf que, pendant mon séjour à Docelles, l’artillerie allemande a beaucoup tiré sans faire d’ailleurs aucun mal à ma batterie. On a même cru, paraît-il, à une attaque et les batteries ont été alertées pendant trois jours. Depuis mon retour, tout est calme et les Allemands ne tirent pas plus que d’habitude. Le commandant, qui dans l’intervalle a été nommé officier de la Légion d’honneur, était de fort bonne humeur et m’a demandé de tes nouvelles, tout en ayant le tort de ne pas s’inquiéter si j’avais suivi ses conseils, tu sais pourquoi.

 

Je n’ai pas besoin de te dire, ma Mi chérie, combien cette permission, beaucoup trop courte à mon gré, m’a fait du bien et quels charmants souvenirs j’en rapporte. Ils vont me permettre de terminer l’hiver sans trop de mélancolie et dans l’espoir d’obtenir une troisième permission le plus tôt possible. As-tu commencé ton régime, parle m’en souvent et dis-moi si tu te sens moins fatiguée. Remercie encore Maman de sa bonne hospitalité et embrasse bien fort nos chéris, tous si gentils et si bien doués, que j’ai eu tant de plaisir à revoir.

 

Continuez-vous à faire les prix de revient ? Ne vous rebutez pas si vous trouvez de temps à autre des contradictions et continuez, vous verrez qu’avec des moyennes vous arriverez à des résultats. A ce sujet, notez pour chaque prix de revient le nombre d’heures de marche des calandres. Notez également le nombre de Kgs de chaque sorte de pâte employée, pour pouvoir connaître à la fin de l’année le kilotage total employé de chaque pâte. En faisant la différence des deux existants et en y ajoutant toutes vos factures de l’année, vous aurez ainsi une balance d’emploi de pâte et vous vous rendrez ainsi compte si vos hottes pèsent bien 10 Kgs en pâte sèche ou si vous avez eu des pertes sur les poids facturés. Ainsi chaque pâte a son petit carnet sur lequel vous portez chaque jour les kilotages employés dans la composition. A la fin de l’année vous avez le total employé A. D’un autre côté sur votre livre de factures que va tenir Mr Bigaut, vous trouverez l’existant au 30 juin 1916 par exemple. Vous y ajouterez toutes les factures reçues du 30 juin 1916 au 30 juin 1917. Vous déduirez de l’ensemble l’existant au 30 juin 1917 et vous aurez ainsi la consommation totale B d’après factures en 1916-1917. En comparant A à B vous aurez le déchet. Comprends-tu ? Ce n’est pas très clair.

 

Puisse cette guerre finir vite, que Dieu t’épargne de gros combats et te ramène à moi, mon chéri.

15 janvier - ELLE.- Je pense bien à toi qui as repris ta vie de soldat et as laissé loin de toi tous ceux que tu aimes, tes trois chéris et ta femme, et qui es maintenant tout seul. Puisse cette guerre finir vite, que Dieu t’épargne de gros combats et te ramène à moi, mon chéri.

 

Ici, toujours la même vie, temps plus ou moins beau, je me lève tard, sors un peu avant midi avec les deux petits. André trotte dans le jardin avec ses suivants et son âne. L’après-midi, je fais ma chaise longue jusque 4 heures en lisant ou en écrivant puis je travaille sous la lampe au bruit des jeux ou disputes des enfants, de leur leçon de piano, etc., en pensant à toi, quand Marie Krantz ou Maman ne sont pas avec moi. Hier Maman est restée toute la journée à la maison, ayant des crampes d’estomac très violentes. Elle s’est soignée par la diète et des infusions d’anis et aujourd’hui elle va de nouveau très bien. Aussi elle partira demain à Paris, non pas pour la réunion des H.G.P., ni pour le dîner que les Mangin offrent chez Larue, qui sera fini d’ailleurs quand elle arrivera, mais elle veut voir si décidément elle aura cette affaire de mandats et peut-être verra-t-elle Maguy qui a dû arriver à Paris jeudi avec son Paul chéri, qui doit voir Albert Thomas pour obtenir de la houille pour sa poudrerie et je pense aussi pour la papeterie.

 

J’ai reçu une carte de Marie Molard, qui me dit que tu n’as absolument pas voulu garder ton képi. J’en suis enchantée et espère recevoir bientôt la photo de mon chéri. Elle me dit aussi d’un air enchanté que tous les Nancéiens sont à Paris, les Weissenburger, Spillmann, etc., qu’il n’y a donc pas qu’elle qui se soit sauvée. La pauvre Marie, on peut dire que cette idée la tourmente, qu’elle laisse donc causer les gens, elle ne changera pas leur esprit. Elle me répète encore de ne pas rester ici si les Allemands reviennent.

 

Nous avons eu ce matin la visite du Dr Froustey, ami de Robert, major du parc de Cheniménil. Il est des Landes et venait nous demander si nous étions décidées à partir à Arcachon, qu’il y faisait très beau cet hiver, son frère qui y est en permission lui écrit qu’il se promène en veston d’alpaga. Tout cela est bien engageant. Je vais d’abord faire ma cure de repos pendant un bon mois et peut-être après me déciderai-je.

 

16 janvier - ELLE.- Maman est partie ce matin à Paris, Thérèse l’a conduite à Epinal. Je suis simplement allée faire une petite promenade avec Dédé cet après-midi jusqu’au château. Il faisait doux et j’ai regretté de n’avoir pas emmené les deux petits.

 

Nous allons tous bien. Thérèse a couru tous ces jours-ci aux environs pour trouver un monteur de câbles, celui de St Dié lui avait dit qu’il viendrait quoique souffrant, mais depuis hier on l’attend et il ne vient pas. C’est ennuyeux car on ne pourra encore pas remarcher.

 

Le bruit court ici que Guillaume II serait mort. Ce ne serait sans doute pas la fin de la guerre, mais enfin son fils pourrait faire quelques bêtises qui nous seraient peut-être très profitables.

16 janvier - LUI.- Je reçois ta carte du 12 et serais heureux que le beau temps revint enfin à Docelles pour que toi-même et les enfants puissiez en profiter. Je regrette que le docteur de Remiremont soit parti si subitement puisque tu semblais avoir grande confiance en lui. Comment vas-tu t’arranger pour tes piqûres ? Il devait, me disais-tu, te faire la première et tu avais demandé à Mlle Krantz de te faire les autres. Enfin, j’espère que tu pourras t’en tirer facilement. Suis bien ton régime en tout cas et écris-lui souvent. Et puis, un peu plus tard, quand tu te sentiras mieux, tu pourras peut-être faire un saut à Paris pour lui rendre visite. Donne-moi des nouvelles des enfants. Les docteurs d’ici prétendent que, lorsqu’on le peut, il vaut mieux changer d’air après la coqueluche. Je sais que tu ne peux pas t’absenter maintenant et que tu es bien mieux à Docelles que partout ailleurs, mais un peu plus tard, si c’est possible, tâchez d’aller quelque part. En été par exemple, pourquoi n’iriez-vous pas aux bords de la mer avec Maguite. Je crois que cela ferait beaucoup de bien aux enfants.

 

J’ai oublié de te dire l’autre jour qu’en m’arrêtant à Nancy, j’avais dîné avec Georges Garnier et que l’oncle Jules et Tante étaient venus à l’hôtel après souper. Georges s’occupe beaucoup des réfugiés. On a naturellement beaucoup parlé du bombardement de Nancy, qui n’avait pas l’air d’ailleurs de beaucoup impressionner les Garnier. L’oncle Jules est toujours très confiant, c’est étonnant pour un homme qui, d’une façon générale, est toujours très craintif. Je ne l’ai pas trouvé vieilli, Tante non plus. Leurs petits-enfants vont bien, paraît-il.

 

Comme je te le disais avant-hier, l’artillerie allemande est très calme depuis mon retour. On se demande pourquoi elle a tant tiré il y a une huitaine. Le bruit court ici que Guillaume II serait mort. Ce ne serait sans doute pas la fin de la guerre, mais enfin son fils pourrait peut-être faire quelques bêtises qui nous seraient peut-être très profitables. A ce propos, tu ne m’as jamais montré la photographie qu’il avait faite à l’Altenberg il y a quelques dix ans.

 

Je suis persuadé que de notre côté tout au moins, il ne sera guère possible d’obtenir une décision par les moyens militaires. En Champagne on a fait tout ce qu’on a pu comme artillerie et infanterie. Résultat : 4 kms de gagnés.

16 janvier - Maurice Boucher (Armées) à Georges Cuny, son beau-frère.- Tout dans ta bonne lettre m’a causé un grand plaisir et ce que tu me dis de Paul et ce que tu me dis de la Filature… Enfin c’est arrangé, j’en suis ravi. Il m’a du reste envoyé une lettre charmante, je l’ai reçue hier en même temps que le mot dans lequel tu me dis notre arrêt par les câbles. Tu avais bien raison quand tu me disais de me méfier des câbles carrés. Ils ne nous ont jamais donné satisfaction, maintenant sont-ils un peu faiblards pour les 40 000 broches. Mais de toute façon ils n’auraient pas dû s’allonger de façon aussi démesurée pour en tout 23 000.

 

Toi qui as vu Auptel en fonction, dis-moi donc un peu ce que tu en penses, en toute franchise. Il m’a fait l’effet d’être un peu gnangnan et d’aimer beaucoup d’ouvriers pour peu d’ouvrages. Nous avons en ce moment suffisamment d’anciens ouvriers pour faire tourner les broches de nos 36 premiers continus, nous avons de plus 17 apprentis de G., 7 apprentis de S.A et 6 à la préparation. C’est un peu beaucoup mais plus tard ils boucheront les trous, nombreux hélas, faits par cette guerre.

 

Tu me dis que tu espères bien que ta prochaine permission sera la définitive, celle qui nous permettra de rentrer dans nos maisons et de reprendre nos affaires. Je le voudrais bien aussi, mais je n’en crois rien, j’ai bien peur que nous en ayons encore pour un an. Je suis persuadé que nous sommes maintenant dans la seconde moitié, de même que je suis persuadé que de notre côté tout au moins, il ne sera guère possible d’obtenir une décision par les moyens militaires. En Champagne on a fait tout ce qu’on a pu comme artillerie et infanterie. Résultat : 4 kms de gagnés. Il suffit du moindre ressaut pour arrêter la meilleure infanterie ; contre un ressaut bien flanqué par les mitrailleuses, il n’y a rien, absolument rien à faire. D’un autre côté la France n’a pas le moyen de s’offrir des sacrifices humains comme les Russes.

 

J’ai espoir dans la baisse du mark, fait certainement déterminé par la grande pénurie financière allemande. Cela peut-être nous permettra de tenir le bon bout, mais c’est encore lointain.

 

Gravures du Petit Journal - Supplément illustré - 16/01/1916 (N° 1308)

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Le général Marchand

Le ‘Supplément illustré du Petit Journal’, poursuivant cette série des portraits en couleurs des chefs illustres de notre armée, qui a été accueillie avec tant de succès par ses lecteurs, leur offre aujourd’hui un magnifique portrait du général Marchand, le glorieux blessé des combats de Champagne qui, à peine rétabli, vient de retourner sur le front. Le général Marchand est une des plus nobles et des plus énergiques figures de notre armée. Une des plus glorieuses aussi. Car, avant de s’illustrer dans la défense du pays, il avait plus que quiconque travaillé à faire rayonner au loin la puissance du nom français. Avant d’être le héros de la Champagne, il avait été le conquérant du centre africain, le chef de cette mission Congo-Nil dont l’odyssée héroïque eût pu tenter un Homère.

 

Marchand est né à Thoissey (Ain) en 1864 dans une humble demeure où son père exerçait la profession de menuisier. Dès son plus jeune âge, le futur général se fit remarquer par la vivacité de son intelligence. Aussi, malgré les lourdes charges auxquelles il devait faire face, son père n’hésita-t-il pas à lui assurer une solide instruction. C’est dans le vieux collège de Thoissey, célèbre maison d’éducation, fondée il y a plus de deux siècles par Anne-Marie-Louise d’Orléans, duchesse de Montpensier, que le jeune Marchand acheva ses études. Placé ensuite chez un notaire de pays, Me Blondel, il ne fut qu’un clerc assez médiocre ; la rédaction d’actes de procédure convenait mal à son esprit aventureux. Souvent il abandonnait l’étude pour promener ses rêves le long des rives verdoyantes de la Saône. A dix-huit ans, il s’engage dans l’infanterie de marine, arrive rapidement sous-officier, est reçu à Saint-Maixent et aussitôt la première épaulette conquise il se lance dans cette voie d’explorations où il devait étonner les Anglais eux-mêmes, bons juges en la matière. L’histoire de la mission qu’il accomplit à travers les solitudes africaines avec une poignée d’hommes, et en compagnie du capitaine Baratier, aujourd’hui général comme lui, et demeuré son ami, son frère, nous entraînerait trop loin. Au surplus, tous les Français ont gardé le souvenir de ce retour triomphal de Marchand en 1899, et de la façon dont Paris l’accueillit. Depuis lors, l’héroïque officier s’était confiné dans la retraite. La guerre l’en fit sortir. Nommé général de brigade, puis général de division, il se distingua à maintes reprises à la tête de ses indomptables marsouins.

 

Un jeune officier, le lieutenant H… qui l’accompagnait dans l’affaire de Champagne a raconté comment le général fut blessé. « Le 25 septembre au matin, dit-il, après une préparation d’artillerie terrible, nous avons attaqué, à neuf heures quinze, pour faire le « trou ». Les balles et les obus faisaient rage et la lutte était dure. Tout à coup, le général voit la gauche s’incurver. Nous prenons le pas gymnastique et nous suivons près de l’aile. A ce moment, un obus éclate et envoie le général en l’air. Je le suis. Nous retombons ensevelis. Il se relève et me rejoint difficilement. Je me lève aussi, tout contusionné. Les hommes ont repris leur élan et nous sommes seuls sous la mitraille. Soudain, le général tournoie et tombe dans mes bras. « Je suis perdu, me dit-il ; j’ai la colonne vertébrale brisée ! Laissez-moi, partez ! » Les mitrailleuses font un vacarme effréné ; la lutte se poursuit acharnée, à cent pas de nous. Nos hommes sont parvenus, enfin ! dans la tranchée allemande. Ils y disparaissent ! La fusillade ne cesse pas et, de la deuxième ligne, elle reprend plus vive. Tout en rampant, je traîne le général et j’arrive à notre ancienne tranchée, où je descends. Puis, je parviens à le charger sur mon dos. Il était évanoui. Un obus tombe dans la tranchée et l’emplit de gaz. J’essaye de me surmonter, mais je tombe suffoqué, entraînant le général dans ma chute. Il reprend connaissance et trouve la force de me demander si je ne suis pas blessé. Fort heureusement, le vent propice dégage la tranchée des émanations qui l’avaient envahie. Je puis ainsi reprendre mon chemin et je ne tarde pas à rencontrer des hommes. Je leur confie mon blessé. Le trajet jusqu’au poste de secours d’abord, à l’ambulance ensuite, fut terrible à supporter. Enfin, après quatre heures de fatigues, je suis arrivé dans une petite ville proche S…, où un chirurgien a opéré le général… »

 

D’autre part, un des soldats qui prirent part à cette attaque a raconté avec quel admirable héroïsme le général avait conduit ses hommes. « Sous la mitraille qui faisait rage, dit-il, le général apparut. Après avoir adressé aux troupes une courte harangue, il se plaça à pied, sa simple canne à la main, sa pipe à la bouche, en avant des lignes, et se mit à marcher à l’ennemi, comme un simple officier à la tête de sa compagnie. » Comment de tels exemples ne feraient-ils pas des hommes autant de héros ? La forte constitution du général lui permit de se rétablir rapidement, malgré la gravité de la blessure. Et, moins de trois mois écoulés, le général Marchand retournait au front, impatient de courir à de nouveaux dangers, à de nouvelles victoires.

 

 

   

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Les émeutes de Berlin - Des femmes du peuple font irruption dans un restaurant à la mode

La colère commence à gronder dans le peuple allemand ; et la colère est conseillère de violence. A Cologne, à Munster, il y a eu des troubles graves. A Berlin on a vu des femmes du peuple faisant irruption dans les salles du café Bauer, au café Central, près de la gare principale, et, rageusement, renverser les tables où dînaient copieusement des messieurs en habit et des « damen » en décolleté de soirée. Une véritable émeute a eu lieu dans l’avenue des Tilleuls. Des milliers de femmes assemblées criaient : « Wir wollen unsere maenner ! » (Nous voulons nos hommes !) La police les a sabrées. Des centaines de femmes et d’enfants sont tombés sous les sabots des chevaux. Le peuple se réveille et se révolte contre ceux qui ont voulu la guerre, contre ceux qui l’affament et qui sont cause de ses souffrances.

 

  

Les instantanés de la guerre (photos)

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A Salonique - Débarquement des automobiles

A Salonique - Débarquement des chevaux

La garde du canal de Suez

Les boulangeries de l'armée russe

Convoi de ravitaillement serbe

Colonne russe

Soldats monténégrins à la frontière d'Autriche

Infanterie russe en marche vers le front

Infanterie russe massée dans un village

Soldats turcs traversant l'Euphrate dans un "cufa"

 

 

Les instantanés de la guerre (photos)

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Cavalerie kurde en Mésopotamie

Tambours et clairons d'un régiment syrien

Troupes soudanaises amenées en Egypte par les Anglais

Le ravitaillement turc s'opère à dos de chameaux dans le Sinaï

Réguliers turcs de la division de Bagdad

Salonique - Soldat français achetant du raisin

L'entente cordiale

En Grèce - Prisonniers turcs escortés par des zouaves

A Salonique - Troupes rassemblées après le débarquement

Dans un village serbe

 

 

Thèmes qui pourraient être développés

  • Angleterre - La conscription votée par 431 voix contre 39 à la Chambre des communes
  • Arme - Nos hommes sont bien protégés contre les gaz asphyxiants
  • Religion - Islam - Problèmes musulmans et solutions parlementaires
  • Allemagne - La diminution de la natalité en Allemagne
  • Industrie - Calcul de prix de revient
  • Photographies de guerre
  • Allemagne - La santé du Kaiser
  • Grèce - Comment les Français ont débarqué à Corfou
  • Généraux - Le général Marchand - Le glorieux blessé de Champagne qui vient de repartir pour le front (Portrait) (LPJ Sup)
  • Allemagne - Les émeutes de Berlin - Des femmes du peuple font irruption dans un restaurant à la mode (LPJ Sup)
  • Front - L'argot des tranchées (LPJ Sup)
  • Les instantanés de la guerre (Photos dans LPJ Sup)
  • Conseils pratiques - Correspondance entre personnes qui ne se connaissent pas - Relations sociales (LPJ Sup)
  • Religion - Fête religieuse - Baptême de Notre-Seigneur - 13 janvier
  • Religion - Fête religieuse - Octave de l’Epiphanie - 13 janvier


[1] Calculs de prix de revient pour la papeterie

[2] Reutlinger : photographe à Paris

[3] Franc : voir dans le Prologue - Le pouvoir d’achat des francs de l’époque (INSEE)



08/01/2016
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