14-18Hebdo

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39e semaine de guerre - Lundi 26 avril au dimanche 2 mai 1915

 

LUNDI 26 AVRIL 1915 - NOTRE-DAME DU BON CONSEIL - 267e jour de la guerre

MARDI 27 AVRIL 1915 - SAINT FREDERIC - 268e jour de la guerre

MERCREDI 28 AVRIL 1915 - SAINT AIME - 269e jour de la guerre

JEUDI 29 AVRIL 1915 - SAINT ROBERT - 270e jour de la guerre

VENDREDI 30 AVRIL 1915 - SAINT LUDOVIC - 271e jour de la guerre

SAMEDI 1ER MAI 1915 - SAINTS JACQUES ET PHILIPPE - 272e jour de la guerre

DIMANCHE 2 MAI 1915 - SAINT ATHANASE - 273e jour de la guerre

Revue de presse

-       La nouvelle attaque contre les Dardanelles

-       Le "Léon-Gambetta" torpillé par le sous-marin autrichien "U-6" - Tous les officiers ont péri à leur poste - 136 hommes ont été sauvés

-       La bataille d'Ypres : c'est peut-être la bataille la plus violente de la guerre

-       Vigoureux bombardements des Dardanelles

-       Les bombardements de Dunkerque

Morceaux choisis de la correspondance

26 avril - Thérèse Boucher (Docelles) à Mimi Cuny, sa belle-sœur.- Nous avons beaucoup pensé à toi, hier, pendant la journée, en désirant bien vivement que ton voyage se poursuive pour le mieux. Nous attendons impatiemment de tes nouvelles. Paul Cuny qui est venu déjeuner hier à la maison a été tout étonné d’apprendre que tu avais été appelée par dépêche, il ne croyait pas sa mère aussi mal. Comme toujours il était très pressé, et pour deux heures et demie, il nous quittait déjà. Il a beaucoup causé affaires et Filature avec Maurice en lui recommandant bien de ne pas se faire de soucis. Il a invité Maurice à venir souvent déjeuner avec lui à l’hôtel du Louvre s’il passe quelque temps à Epinal.

 

L’auto marche de nouveau bien grâce à Monsieur Montgolfier qui s’est chargé de décrasser les parties qui en avaient besoin. Quant à la direction et mise en route, le capitaine Carde nous la fera arranger demain par son chauffeur personnel.

 

Maurice tâche de rendre à Maman de petits services. Ce matin il a recherché des offres de différents articles qui étaient classés dans les dossiers de Maman, mais ignorant le nom elle ignorait également la 1ère lettre. Cet après-midi il s’occupe de la nouvelle installation de moteur électrique que Maman devra faire, la machine à enveloppe demandant quelques chevaux. J’ai fait le catéchisme hier. Cela a très bien marché. Nous avons aussi eu la visite de mes parents hier. Lili a été trouvé très gentil. Françoise a fait mille singeries se pensant être plus intéressante.

 

26 avril - Alice Mangin, femme d’un cogérant, (Neuchâtel) à Georges Cuny.- Nous avons été bien attristées hier en recevant la nouvelle de la mort de votre pauvre mère[1], et pour vous qui êtes séparé d’elle depuis si longtemps et qui n’avez pu la revoir, ce doit être affreux de songer qu’elle est morte sans que vous ayez eu la consolation de l’entourer dans ses derniers moments ! J’aurais voulu aller près de ces Dames et donner à votre chère Mère un dernier témoignage d’affection, mais le service a eu lieu trop tôt ce matin à 8h1/2 et il ne nous était pas possible d’arriver. Elle vous protègera de là-haut, mon cher Georges, et nous aurons le plaisir de nous retrouver tous après cette longue et terrible guerre. Nous autres femmes françaises nous prions pour vous tous et la séparation si longue et si pénible d’avec nos chers maris, nous tâchons de la supporter aussi courageusement que nous le pouvons pour les aider au moins moralement.

 

28 avril - Gustave Cuny (Epinal) à Georges Cuny, son cousin.- Depuis quelque temps déjà les lettres et dépêches adressées de Lausanne à Paul étaient devenues inquiétantes, néanmoins nous comptions toujours sur la forte constitution de ma tante pour triompher de la maladie. Aujourd’hui c’est fini, et fixé à ton poste de combat tu ne peux que pleurer ta bonne mère si dévouée, si affectionnée qui vous chérissait tant et qui n’a jamais vécu que pour vous.

 

Quelle tristesse pour elle qui s’est tant dévouée pour les siens de s’éteindre à l’étranger sans avoir la consolation suprême de revoir ses fils.

28 avril - Jean Boucher (Gafsa - Tunisie) à Mimi Cuny, sa cousine.- Toute la famille conservera le souvenir de sa bonté, de son accueil bienveillant et si affable. Quelle tristesse pour elle qui s’est tant dévouée pour les siens de s’éteindre à l’étranger sans avoir la consolation suprême de revoir ses fils. Heureusement ses filles étaient auprès d’elle ! Quels durs moments ! C’est la triste moisson de l’époque actuelle. Nous n’osons écrire à ton frère Georges mais je serais heureux de savoir ce qu’il devient dans son camp. Il y est certainement moins bien traité que les soldats boches ne le sont ici où ils engraissent à vue d’œil. Les derniers combats si âpres dans les Vosges alsaciennes me causent bien de l’angoisse pour Paul. Nous nous réfugions sous les ailes de la bonne chance : Inchallah ! disent les Arabes.

 

28 avril - Paul Cuny (Epinal) à Georges Cuny, son frère.- La mort de notre pauvre maman[1]. C’est terrible de nous quitter en de pareilles circonstances, sans avoir pu nous embrasser, nous dicter ses dernières volontés, sans même pouvoir rejoindre ce bon Gérardmer où elle a eu tout à la fois tant de mal et aussi un peu de plaisir. Une consolation pour nous tous c’est qu’elle n’a pas trop souffert à ses derniers moments et, si nous les fils nous étions absents, c’est qu’elle avait auprès d’elle en mourant sa fille et ses deux belles-filles (ta femme est arrivée juste à Lausanne ce soir-là). Mais quelle perte irréparable pour l’avenir quand je songe à ce que son énergie et sa volonté ont pu faire pour nous. Nous n’avons pas trop mal réussi dans la vie jusqu’alors grâce à elle, souvenons-nous en toujours.

 

29 avril - Paul Luc (Nancy) à Georges Cuny, son ami.- Le souvenir très précieux que nous conserverons de ta chère mère qui mérite l’admiration de tous pour ses qualités et la façon remarquable dont elle a su accomplir la lourde tâche qui lui incombait lorsqu’elle est restée seule avec quatre enfants encore bien jeunes.

 

29 avril - Maguy Laroche-Joubert (Lescalier-Angoulême) à Georges Cuny, son beau-frère.- La douleur de n’avoir pu lui donner la consolation d’un doux regard sur ses trois fils, son orgueil et sa joie. Pauvre maman qui a vécu toute sa vie rien que pour ses enfants, pour son devoir et pour leur bonheur et qui n’a pu les embrasser une dernière fois, qui aimait tant sa maison, son chez elle et qui finit sa vie si bien remplie si loin de son pays, dans une chambre étrangère. Ta pauvre maman te bénit du haut du ciel et prie pour toi et sa protection de là haut sera aussi douce et dévouée que parmi nous.

 

1er mai - Paul Boucher (Armées – Har………..Kopf[2]) à Georges Cuny, son cousin.- Que de peines s’accumulent, l’oncle Paul Boucher, la grand’mère Vautrin, mon frère François, tante Clémentine, la liste n’est pas close car vu que les chances augmentent constamment étant toujours de plus en plus exposé, il faudrait un hasard extraordinaire pour ne rien attraper, et aussitôt qu’un coin est calme on nous le fait quitter pour aller à un guêpier. Voici un mois où nous avons reçu tous les jours un bombardement terrible, parfois à la cadence de 1 000 obus à l’heure sur un secteur de 2 bataillons !! Enfin le moral et la santé sont bons.

 

1er mai - Marie Paul Cuny (Chailly - Suisse) à Georges Cuny, son beau-frère.- Je crois que Mère n’eut conscience de son état que les trois derniers jours. Jusque là elle paraissait espérer une guérison au moins relative. Le mercredi nous nous entretenions encore ensemble de combinaisons de ménage. C’est le vendredi qu’elle me confia son découragement en constatant l’inefficacité des nouveaux remèdes. Dieu la jugeait prête à recevoir la récompense promise aux âmes droites et de bonne volonté. Dimanche matin, on la sentait paisible, se reposant en Jésus « avec lequel je serai demain » « Vous savez bien que je vous aimais bien tous ». Le docteur l’a soulagée au moyen de piqûres et d’oxygène, j’ai la conviction qu’à partir de 8 h, moment où elle est devenue tout à fait calme, elle n’a plus senti la souffrance. Elle s’est éteinte vers minuit ½, entre ses trois filles. Nous n’avons pu ramener notre Mère à Gérardmer, elle reposera à Lausanne jusqu’à la fin de la guerre.

 

2 mai - Thérèse Boucher (Docelles) à Georges Cuny, son beau-frère.- Maurice nous a quittés jeudi et nous nous demandons combien de temps on le gardera à Epinal. De l’affectation qu’il désirait beaucoup nous n’avons point de nouvelle, ces choses-là sont toujours tellement lentes que je souhaite qu’on ne le fasse pas partir au front avant que n’arrive sa nomination. En attendant nous pourrons le voir quelquefois.

 

2 mai - JMO 5e RAC/Groupe 95.- Tir de concentration des 3 batteries du groupe à 4 heures sur les pistes cavalières entre Vaurezis et le bois au sud de ce village. Pour chaque batterie il y a eu 6 coups tirés ensemble.

 

Gravures du Petit Journal - Supplément illustré - 02/05/1915 (N° 1271)

 

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Le dernier exploit de Garros - Un aéroplane allemand mitraillé et incendié

On sait que Garros, le célèbre aviateur français, montait seul son appareil. Point d’observateur, point de mitrailleur avec lui. Grâce à un dispositif spécial imaginé par lui, il pouvait simultanément conduire son avion et tirer sur l’ennemi. De ce fait, l’appareil délesté du poids d’un observateur, avait son maximum de vitesse et permettait à Garros de poursuivre et rejoindre les plus rapides aéroplanes de l’ennemi. Garros put ainsi triompher à maintes reprises des aviateurs allemands. Ses actes d’audace et d’héroïsme semaient l’épouvante dans les escadrilles ennemies. Voici, décrit par un témoin, le dernier exploit qu’il accomplit. « Garros était parti pour lâcher des obus sur une défense allemande. Arrivé à dix kilomètres de nos lignes, il voit, assez loin et bien au-dessus de lui, à cinq cents mètres plus haut, un appareil sur lequel nos batteries tiraient. Il manœuvre pour lui couper la retraite, tout en s’efforçant de prendre de la hauteur. Cela dure six à huit minutes. Arrivé à bonne hauteur, il s’approche, malgré le tir de nos batteries, en ouvrant le feu à trente mètres ; le Teuton répond à coups de fusil. Garros décharge sa mitrailleuse trois fois. Au bout de quelques balles, l’ennemi fuit en désordre, descendant à toute allure. Garros est dessus, ne le lâchant pas d’un mètre. Le combat dure dix minutes. Il se termine à mille mètres d’altitude ; criblé comme une passoire, l’avion allemand prend feu subitement. Une immense flamme l’environne et il dégringole en tourbillon. C’est tragique, affreusement angoissant. En moins de vingt-cinq secondes de chute, qui paraissent d’une incroyable durée, l’appareil s’écrase sur le sol dans une grande fumée. » Hélas ! quelques jours plus tard, un stupide accident de moteur forçait l’héroïque aviateur à descendre dans les lignes allemandes. Garros était fait prisonnier. Mais ses camarades, ses émules nous restent nombreux et, comme lui, héroïques. Et les Allemands s’apercevront que, faute d’un aviateur, si habile et si vaillant qu’il soit, l’aviation militaire ne chôme pas.

 

 

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Poste d’infanterie italienne aux frontières du Trentin

L’Italie, avec calme, avec méthode, s’est préparée. « Nous réglons les derniers détails », disait ces jours derniers un personnage italien en vue, à notre correspondant à Rome. Et il ajoutait : « Nous sommes tout près de la fin… ou plutôt du commencement.. Nous en sommes ‘alle ultime sgocciole’ (aux dernières petites gouttes). Croyez-moi, nous avons le doigt sur le déclic. » Et toutes les mesures prises par l’Italie confirment ces déclarations. La frontière de ce pays du Trentin, qui doit faire retour à la patrie italienne est bien gardée, et l’armée de la sœur latine est pleine d’enthousiasme pour la cause de la justice et du droit.

 

 

Les instantanés de la guerre (photos)

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Aux Dardanelles - La vie à bord d'un cuirassé - La boucherie à bord

Aux Dardanelles - La vie à bord d'un cuirassé - Les cuisiniers préparant la soupe

Aux Dardanelles - La vie à bord d'un cuirassé - Les marins lavent leur linge dans l'entrepont

Aux Dardanelles - Blessé dans une tourelle, un marin est évacué à l'aide d'un brancard métallique

Dans le Nord - Une ligne de tranchées anglaises bien défendue

En convalescence - Soldats anglais et français faisant des assauts de boxe

A l'ambulance anglaise de la gare du Nord - Infirmier transportant un blessé du train à la couchette en attendant son transfert à l'hôpital

Au repos - Soldats anglais et français jouant au foot-ball

 

Les instantanés de la guerre (photos)

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Concentration des troupes - La défense des rives du Rhin par les Allemands

Dans le Nord - Une fabrique de tissages après le passage des barbares

Un canon contre les avions - La pièce pendant le tir

Sur une route de Belgique - Les Huns mènent les autres

Dans les ruines des Flandres - Instantané d'une charge des spahis algériens

En Belgique - La cour d'une ferme transformée en cimetière, les tombes des soldats français et belges morts pour leur patrie

Section de mitrailleurs français aux environs de Soissons

Dans les Carpathes - Une tranchée autrichienne dans la taïga

 

Thèmes qui pourraient être développés

  • Marine - Le "Léon Gambetta" torpillé
  • Ypres - La bataille d'Ypres est peut-être la bataille la plus violente de la guerre
  • Dunkerque bombardé
  • Les Dardanelles
  • Le gouvernement anglais et l'alcoolisme
  • Allemagne - L'Empereur et ses collaborateurs
  • Les femmes de France et la guerre
  • L'aviation et la guerre (LPJ Sup)
  • Le Trentin - Poste d’infanterie italienne aux frontières du Trentin (LPJ Sup)
  • Les instantanés de la guerre (Photos dans LPJ Sup)
  • Conseils pratiques - Tenues de deuil (LPJ Sup)
  • Religion - Fête religieuse - Notre-Dame du Bon Conseil - 26 avril


[1] Clémentine Cuny : voir son portrait Clémentine Cuny (1850-1915)

[2] Hartmannswillerkopf ou Vieil Armand



24/04/2015
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