14-18Hebdo

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38e semaine de guerre - Lundi 19 avril au dimanche 25 avril 1915

 

LUNDI 19 AVRIL 1915 - SAINTE EMMA - 260e jour de la guerre

MARDI 20 AVRIL 1915 - SAINT THEODORE - 261e jour de la guerre

MERCREDI 21 AVRIL 1915 - SAINT ANSELME - 262e jour de la guerre

JEUDI 22 AVRIL 1915 - SAINT LEONIDE - 263e jour de la guerre

VENDREDI 23 AVRIL 1915 - SAINT GEORGES - 264e jour de la guerre

SAMEDI 24 AVRIL 1915 - SAINT GASTON - 265e jour de la guerre

DIMANCHE 25 AVRIL 1915 - SAINT MARC - 266e jour de la guerre

Revue de presse

-       Garros prisonnier

-       Situation tragique à Trieste

-       La bataille des Carpathes, l'avance russe continue malgré de formidables contre-attaques austro-allemandes

-       La disette en Allemagne reconnue par les Allemands

-       Nos succès au Bois d'Ailly

Morceaux choisis de la correspondance

19 avril - Marie Paul Cuny (Chailly-Lausanne) à Georges Cuny, son beau-frère.- La St Georges était une fête de famille ; sans les baisers de votre chère Mimi, les fleurs et les compliments des bons petits, elle passera triste et mélancolique. Nous souhaitons avoir bientôt le bonheur de vous fêter avec la grande victoire du pays, à laquelle vous avez vaillamment concouru. Il paraît que vos hommes nous ont devancés, guirlandes et banderoles vous ont montré d’une façon touchante leur admiration et leur attachement à votre personne. Oh ils doivent rudement vous aimer. Marie m’écrit que vous avez été ému de ces témoignages. Vous êtes plus au calme paraît-il, trop à votre gré. Ayant pratiqué le métier des armes en son temps héroïque, les luttes commerciales vous paraîtront peut-être monotones. J’espère que non, après la guerre ne sera-ce pas le meilleur terrain d’activité.

 

19 avril - Marie Molard (Lausanne) à Mimi Cuny, sa belle-sœur.- Je reçois à l’instant ta bonne lettre m’annonçant ton arrivée dès que tu auras ton passeport. Je voulais justement te télégraphier de venir car Maman exprime le désir de te voir. Elle est bien mal et a reçu les derniers sacrements hier.

 

19 avril - Marie Paul Cuny (Chailly-Lausanne) à Mimi Cuny, sa belle-sœur.- J’ai trouvé notre Mère plus affaiblie, elle a même du délire. L’analyse de sang ne donne que 20% d’hémoglobine, c’est infime, en novembre elle avait 28%. A partir d’aujourd’hui notre malade prendra du sérum, une nouvelle consultation avec un autre docteur décidera si une transfusion du sang est indiquée. J’ai causé avec le Dr Chester, il est hélas tout à fait pessimiste, et pour un temps rapproché. Pauvre bonne Mère, le bonheur de revoir ses fils ne lui sera pas accordé.

 

La durée probable de la guerre… Sujet interminable !

Est-ce là le grand coup du printemps qui se fait sentir aux Eparges, à N.D. de Lorette, au bois Le Prêtre ?

19 avril - Lieutenant Ducrot (Armées - Besançon) à Georges Cuny.- Hamon est encore à l’hôpital (Hôpital St Jacques à Besançon) pour trois ou quatre semaines privé de toute activité. Il ne peut que lire des journaux et des livres, fumer des cigarettes et causer avec d’autres lieutenants de la durée probable de la guerre (sujet interminable !). Le front me fait, en ce moment, l’effet d’une machine qui essaye de démarrer avec quelques dérapages. Est-ce donc là le grand coup du printemps qui se fait sentir un peu partout aux Eparges, à N.D. de Lorette, au bois Le Prêtre. Ce qui est certain, c’est que je reçois des lettres de plusieurs points du front, de soldats comme d’officiers, et que tous manifestent l’intention d’attendre aussi longtemps qu’il faudra pour déterminer la retraite du Boche. On se convainc de plus en plus que seule l’action directe peut avoir ce résultat, les actions indirectes espérées par l’Italie, par la Roumanie, par les Dardanelles même ne venant qu’en second.

 

20 avril - Petitgenêt (Cornimont - HGP) à Georges Cuny.- J’ai un sursis jusqu’au 10 mai. Parmi les clients débiteurs sur factures avant guerre : Speidel maison allemande nous doit 2 887f10 : le séquestre est informé. Léon Fribourg & Fils, 13 423,75, mobilisés, ont informé qu’ils paieraient après guerre. La plupart des clients de Constantine et de Tunisie ne peuvent payer qu’après le moratorium.

 

20 avril - Célina Boucher (Docelles) à Georges Cuny, son gendre.- Tu ne seras pas près de nous, près de ta femme et des bons chéris, le jour de ta fête, nous sentirons tous très cruellement cette séparation d’autant plus en la St Georges qui s’approche. Sois sûr que notre pensée t’accompagne, mon cher ami, et que nos vœux tendent exclusivement au retour de tous nos combattants en bonne santé. Tout en se fatigant facilement Marie va bien et pense à partir bientôt pour la Suisse, ta maman étant toujours fort souffrante. Robert va mieux mais nous surveillons beaucoup son régime.

 

Nos fils sont morts en braves et on a l’espoir d’aller les retrouver un jour où l’on ne se quittera plus.

22 avril - Jean-Baptiste Joly (Cornimont, HGP, concierge à l’usine du Bâs) à Mimi Cuny.- Nous sommes heureux de voir que vous êtes avec nous pour partager les regrets de nos chers enfants sur la perte cruelle que nous venons d’éprouver envers eux. Camille est tombé au champ d’honneur frappé d’une balle à la tête en entraînant ses hommes à une charge à la baïonnette sur le 3e rég. de la garde prussienne à la côte 196 Mesnil les Hurlu dit le Bois Brûlé. Son capitaine nous a fait ses condoléances nous disant qu’il vient de perdre le meilleur de ses sous-officiers, que ses hommes le regretteront car il n’a cessé de leur donner l’exemple du calme et du courage. Aujourd’hui nous avons reçu son mortuaire. Quant à Abel, nous n’avons plus aucun espoir. Léon Lemaire a écrit à ses parents qu’il nous prévienne de sa mort, qu’il avait remis son porte-monnaie au sergent Fourrier et qu’il tenait sa montre à notre disposition : frappé par un obus il est mort avec cinq de ses camarades à Hartmannswillerkopf. Ce qui nous console c’est qu’on sait qu’ils sont morts en braves et on a l’espoir d’aller les retrouver un jour où l’on ne se quittera plus.

 

23 avril - Cécile Biesse (Nancy) à Mimi Cuny, sa cousine.- Tu ne me dis rien de ton frère Georges. Mais peut-être ne peut-il pas vous donner grands détails sur sa vie de prisonnier. Ce qui me peine le plus c’est qu’il a été pris contre son gré, à l’ambulance, lui qui s’est si bravement conduit. Le secteur de ton mari est plus calme depuis quelque temps. En lisant les communiqués on s’attarde surtout aux régions où se trouve l’un ou l’autre de la famille. Camille est depuis quelques jours du côté de N.D. de Lorette mais je ne pense pas que ce soit pour longtemps. Ses nouvelles fonctions l’intéressent beaucoup, il voit absolument tout ce qui se passe dans le corps d’armée et distribue le travail aux officiers. De temps en temps des missions, inspections ou reconnaissances. Il était complètement démonté et a trouvé au dépôt deux bons chevaux de l’Argentine, quoique insuffisamment dressés, il prendra le troisième à la première occasion. Il paraît qu’Henri de Reure[1] en a vu débarquer 100 000, mais ce sont des chevaux qui ont toujours vécu dans les prairies et qu’il faut dresser avant de les envoyer dans les dépôts, ce sont de belles bêtes. Tu sais que nous avons bombardé les alentours de Metzeral. C’était probablement depuis le Rothenbach ou le Reinkopf car l’oncle Ernest nous a dit que l’on avait monté là haut à l’aide de schlittes des canons depuis chez Dédet. Marguerite m’a écrit que le général Joffre était venu mercredi à Gérardmer où il avait fait une remise de décorations. Le nouveau général, Monsieur de Pouydraguin, qui loge chez Madame Estelle est un ancien colonel du 26ème et a connu tante Célina, a trois fils sous les armes. Le nouveau petit neveu se nomme André, il va très bien ainsi que sa maman et toute la famille à Thiéfosse.

 

24 avril - Marie Molard (Lausanne) à Georges Cuny, son frère.- Notre chère Maman va un peu mieux aujourd’hui mais elle a été bien malade avant-hier. Elle était dans le délire, et tu peux deviner mes souffrances en entendant ma pauvre mère divaguer toute une journée. J’ai redemandé une consultation et séance tenante on a fait une injection de sang à maman. C’est notre bon docteur qui s’est offert et c’est à son bras qu’on a tiré du sang pour l’injecter tout chaud à notre pauvre malade. On recommencera lundi, on ne peut le faire plus souvent sans risque. Je m’y suis offerte pour lundi. Marie Paul me dit que je dois en demander la permission à mon mari par dépêche, mais je n’en ferai rien.

 

Gravures du Petit Journal - Supplément illustré - 25/04/1915 (N° 1270)

 

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Le cauchemar de la Germania

Après tant de rodomontades, voici où en est l’Allemagne. Les correspondances de Hollande annoncent que l’on travaille à mettre en état de défense la ligne du Rhin entre Düsseldorf, Cologne et Coblence. On trouve sur les Allemands prisonniers des lettres de ce genre. « Aix-la-Chapelle, 15 Mars. Nous devons être reconnaissants de ce que l’ennemi sauvage n’a pas encore pénétré dans notre pays, mais Dieu sait ce qui pourrait arriver. » « De Karlsruhe… Il faut prier Dieu pour qu’il ne laisse pas pénétrer les Français dans notre cher pays. » Ils craignent l’invasion des Français et des Anglais chez eux. Germania en a le cauchemar. Que sera-ce, quand on franchira le Rhin, le Rhin allemand… Tremble Germania, et souviens-toi. Où le père a passé passera bien l’enfant.

 

 

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Prisonnier russe mutilé par des officiers allemands

Le grand état-major a communiqué la note suivante. Dans la nuit du 29 mars, les Allemands avaient fait prisonnier au nord de Myszinec un de nos éclaireurs, le sous-officier Paphyre Panasiouk. Conduit au quartier allemand de Rasoga, Panasiouk fut invité à espionner au profit des Allemands, une récompense en argent lui avait été promise. Sur son refus catégorique, Panasiouk fut menacé, en cas d’obstination, d’avoir successivement les oreilles et le nez coupés, puis les yeux crevés et d’être pendu par les jambes. Ces menaces n’ayant pas ébranlé le courage de Panasiouk, un officier lui coupa d’abord avec des ciseaux le lobe de l’oreille droite ; puis, à quatre reprises successives, il lui découpa le pavillon de l’oreille en ne lui laissant qu’un bout de cartilage autour du canal auriculaire. En même temps, un autre officier mutilait le nez du malheureux en séparant le cartilage d’avec l’os et en lui portant des coups de dents. La torture dura une heure entière et n’aboutit à aucun résultat. Panasiouk fut amené sous escorte vers un lieu d’internement, mais il s’échappa du convoi en profitant de l’obscurité. Il a été placé à l’hôpital de Varsovie, les médecins ont fait un procès-verbal de sa déposition et ont photographié sa face mutilée.

 

Thèmes qui pourraient être développés

  • Italie - Trieste
  • La disette en Allemagne
  • Le Bois d'Ailly
  • Religion - Les derniers sacrements
  • Notre-Dame-de-Lorette
  • Le Bois le Prêtre
  • Les préparatifs de l'Italie
  • Autriche - François-Joseph à sa table de travail
  • L’Hartmannswillerkopf
  • Argentine - Des chevaux d'Argentine
  • La nourriture des soldats
  • Allemagne - Le cauchemar de la Germania (LPJ Sup)
  • Prisonnier russe mutilé par des officiers allemands (LPJ Sup)
  • Matériel - Schlitte : sorte de traîneau dans la montagne vosgienne


[1] Henri de Reure, un cousin



17/04/2015
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